C’est l’art de la contre-publicité. G7 diffuse un message vantant son comportement citoyen : pendant la canicule parisienne : les prix des taxis G7 ne monteront pas !

Il pointe en creux Uber qui, avec son régime de tarification marginale, augmente très fortement le prix de ses courses. Normal, diront les gens de Uber : avec la canicule, les gens remisent leurs voitures chez eux ou préfèrent le taxi climatisé au métro. La demande de taxis s’accroît donc vivement. La hausse du prix de la course n’est que la traduction de ce déséquilibre entre offre et demande. Mais elle est, poursuivent-ils, autorégulatrice : c’est la hausse de la rémunération qui va persuader le chauffeur de quitter sa télévision et prendre le volant, ce qui accroît l’offre à nouveau. Voilà bien un raisonnement d’économiste.

Sauf que ! Il y a là l’important débat sur les prix abusifs ou price gouging en anglais. Oui, le rééquilibrage par le jeu des prix est une bonne chose. C’est bien l’idée derrière la tarification variable d’EDF ou même derrière la taxe carbone. Mais faut-il l’appliquer en situation de catastrophe ? La hausse de prix ne soulève-t-elle pas alors une question éthique : pourquoi faire subir aux gens, surtout aux bas-revenus, une double peine : contraints déjà de prendre un taxi, les voici obligés d’acquitter en plus un tarif accru ? C’est ce dont se plaignaient les habitants de Miami à qui l’on demandait de quitter la région devant l’avancée du cyclone Irma en septembre 2017 quand ils subissaient un doublement des tarifs aériens. On perçoit qu’il y a eu un peu de cette problématique lors des protestations gilets jaunes contre la taxe carbone.

Le débat n’est pas prêt de finir. Le médiatique philosophe de Harvard, Michael Sandel, a écrit un formidable livre sur le sujet : Ce que l’argent ne saurait acheter. Les limites morales du marché, Paris, Seuil, 2014. Pour un résumé et une discussion économique de la thèse de Sandel, on renvoie le lecteur à cet article de la revue Esprit.

Toujours est-il que G7 profite de l’occasion et cherche à mettre la vertu citoyenne de son côté.

Il est intéressant de rappeler que les modes de rémunération des chauffeurs diffèrent entre le taxiste G7 et le VTC Uber. Le taux de commission de Uber est fixe, à 25%, alors que le taux de commission marginale de G7 est nul : le chauffeur paie son abonnement mensuel fixe au réseau internet G7 et en voici pour lui. S’il quitte sa télévision pour prendre le volant, il touchera 100% de la course marginale. Le chauffeur Uber, 75%, mais d’une course dont le prix aura augmenté. Comment ne pas constater qu’Uber profite de la canicule, à la différence de G7, drapé dans sa vertu et surtout dans un mode de facturation différent.