Par la voie de Vox-Fi, la DFCG se faisait l’écho, le lundi 23 mars, des risques de dépôt de bilan des TPE/PME les plus vulnérables, dans le contexte de l’épidémie du Covid-19, mettant particulièrement en danger les plus petites entreprises. Les précisions apportées en début de semaine par les pouvoirs publics devraient soulager la trésorerie de ces entités, à condition qu’elles actionnent dans les meilleurs délais les leviers clés mis à leur disposition par le gouvernement, ainsi que les mesures d’accompagnement proposées par certains élus locaux. Encore faudrait-il que ces dispositifs ne tombent pas dans les méandres des constitutions et instructions de dossiers, dans une période de saturation totale des conseillers bancaires, quelle que soit leur bonne volonté.

L’État a mis en place mardi un fonds de 300 Md€, pour que les entreprises de moins de 5 000 salariés au chiffre d’affaires (CA) inférieur à 1,5 Md€, aient accès à un financement représentant jusqu’à 3 mois du CA 2019 (l’équivalent de 3 mois de CA que l’entreprise n’aura pas pu réaliser en 2020). Selon l’arrêté accordant la garantie de l’État aux établissements de crédit et sociétés de financement (JO du 24 mars 2020), sont éligibles les prêts présentant un différé d’amortissement minimal de 12 mois (avec une clause donnant aux emprunteurs la faculté, à l’issue de la 1ère année, de les amortir sur une période additionnelle de 1 à 5 ans. Ces prêts sont garantis par l’État (PGE) à hauteur de 90% (80% et 70% pour les grandes et très grandes entreprises) du montant du capital, intérêts et accessoires restant dus de la créance jusqu’à l’échéance de son terme.

Reste à voir comment cela va se passer sur le terrain. Nous constatons déjà que beaucoup de sites et de plateformes saturent et que certains banquiers sont difficiles à joindre. Il est vrai que, face à un volume d’appels et d’emails considérable et à des salariés de banques pour partie affectés par le virus, les entreprises devront faire preuve de patience. Le PGE sera commercialisé jusqu’à la fin 2020, mais cela risque d’être trop tard pour beaucoup de PME.

Nous ne savons pas à ce stade ce que devra comporter le dossier de demande de prêt. La banque de l’entreprise détient déjà les comptes annuels du dernier exercice clos. Il ne faudrait pas qu’elle exige un arrêté comptable intermédiaire (au 29 février 2020, comme nous venons de l’expérimenter). Il serait à notre avis plus pertinent de se limiter à la situation globale de trésorerie de l’entreprise à la date de demande du prêt et à 2 budgets prévisionnels d’exploitation et de trésorerie 2020, avec une hypothèse basse et une hypothèse haute, fonction de la durée estimée du confinement et de la force attendue du rebond. Nous ne pouvons que recommander aux entreprises de prendre le temps d’établir ces documents prévisionnels, ne serait-ce que pour être en mesure d’évaluer leur besoin de trésorerie immédiat et le montant du PGE à solliciter.

Le parcours à suivre pour obtenir le PGE vient d’être précisé :

– contact préalable par email avec le conseiller bancaire et organisation d’un

 rendez-vous sur place ;

– analyse du dossier par le conseiller et détermination avec l’entreprise du montant et du taux d’intérêt du prêt (coût du financement par la banque + coût de la garantie de l’État) ;

– obtention du pré-accord de la banque (en cas de refus par la banque d’octroyer, le PGE, l’entreprise peut se tourner vers la Médiation du crédit ;

– renseignement par l’entreprise d’un certain nombre d’informations (numéro SIRET, montant du CA, montage financier convenu avec la banque) sur une plateforme dédiée mise en place par la BPI ;

– téléchargement par l’entreprise de l’attestation BPI et de l’identifiant unique obtenu de la BPI ;

– transmission de cet identifiant au conseiller et décaissement du prêt par la banque.

Un comité de crise sur le crédit interentreprises, dont la situation se tend considérablement avec le confinement, a également été mis en place mardi. Devant l’incertitude de la période, un allongement significatif des délais de paiement des factures fournisseurs a en effet été constaté. Ces retards de paiement affectent la trésorerie des sous-traitants qui eux-mêmes arrêtent de payer leurs fournisseurs. Cet effet domino met clairement en danger de nombreuses PME. IL est vital de maintenir la relation de confiance entre les différentes parties de la chaîne de valeur et de faire preuve de citoyenneté et de sens des responsabilités. Heureusement, un élan de solidarité commence à se manifester et certains donneurs d’ordre ont indiqué récemment réduire leurs délais de règlement, voire payer comptant. Le comité de crise sur le crédit interentreprises a en tout état de cause menacé de pratiquer le name and shame auprès des mauvais payeurs afin d’inciter aux pratiques solidaires avant, pour les récalcitrants, d’enlever la garantie de l’État sur les PGE accordés.

D’autres mesures exceptionnelles ont été prises ces deux derniers jours pour accompagner les entreprises en difficulté, ainsi que les travailleurs indépendants et professions libérales. Ainsi, pour les entreprises de plus de 50 salariés dont la date d’échéance Urssaf intervient le 5 du mois, l’échéance du 5 avril peut être reportée jusqu’à trois mois. Il est néanmoins impératif de transmettre la déclaration sociale nominative avant lundi 6 avril 12h00. Certains élus locaux ont également pris des initiatives. Ainsi la ville de Paris s’engage dès à présent à geler les loyers perçus par la ville et ses bailleurs, ainsi que les redevances perçues au titre de l’occupation de son espace public. Elle propose également l’accélération des délais de paiement pour les marchés publics et l’accompagnement de ses partenaires contractuels, ainsi que le stationnement gratuit sur l’ensemble du territoire parisien (Cf. la plateforme Paris.fr).

Le conseil des ministres d’hier a enfin examiné une 1ère série d’ordonnances destinées à mettre en œuvre les mesures prévues par la loi d’urgence sanitaire, votée le week-end dernier par le Parlement, notamment la création d’un fonds de solidarité (ordonnance n°2020-317 du 25 mars), le report des paiements de loyers, factures d’eau, de gaz et d’électricité, les remboursements en avoirs des professionnels du tourisme, la modification des congés payés des salariés. La durée d’intervention du fonds de solidarité est de 3 mois, mais elle peut être prolongée par décret pour une durée d’au plus 3 mois. Ce fonds sera financé par l’État et, sur la base du volontariat, par les régions et collectivités. Nous recommandons vivement aux TPE/PME qui souffrent de fortes tensions de trésorerie de suivre l’actualité des modalités d’intervention de ce fonds, susceptible d’apporter du cash en direct, des dégrèvements, des délais de paiement sans majoration de retard ni pénalité, ainsi que l’ajustement de leur échéancier de cotisations. Nous ne pouvons que renvoyer le lecteur de Vox-Fi à l’effort que fait la DFCG sur son site pour faire circuler l’information et proposer les bonnes pratiques.

 

26 mars 2020