Du revenu brut au revenu net des ménages français
L’INSEE a joué, parmi les grands instituts statistiques, un rôle de pionnier qu’il s’agit de saluer. En matière de revenus des ménages, il travaille depuis longtemps dans une double direction, en lien avec les comptes nationaux. Et vient, en cette fin 2024, de mener à bout l’investissement fait, ce qu’il appelle les comptes nationaux augmentés que l’Institut présente ici. Il est d’une part capable de mesurer comment le revenu disponible après impôts est distribué entre les ménages de différents niveaux de revenus (en pratique les déciles de un à dix, le D1 correspondant aux 10 % des ménages les plus modestes) ; de l’autre, de savoir comment on passe du revenu dit primaire, c’est-à-dire tiré de l’activité (pour les salariés ou pour les indépendants) ou de la détention d’actifs économiques, au revenu net. Dans ce dernier cas, les étapes sont les suivantes :
Le ménage touche d’abord, en termes logiques, un revenu primaire (#1), paie dessus des impôts ou des prélèvements, comme par exemple les cotisations sociales (#2), reçoit des prestations monétaires (de retraite, de famille, etc.) (#3), mais reçoit aussi des prestations non monétaires ou en nature (santé, école gratuite, etc.) (#4) et pour finir, et en faisant l’addition, perçoit un revenu net (#5), ce que l’INSEE appelle le niveau de vie élargi.
En voici l’illustration graphique :
On voit clairement l’effet très puissant qu’a la redistribution au sens large dans la société française : les impôts et prélèvements sont assez progressifs (sauf pour le 1 % ou plus encore le 0,1 % du haut de la distribution des revenus, ce qui est un autre sujet). Mais les transferts sont également progressifs en faveur des ménages modestes, particulièrement pour les transferts non monétaires. Au total, la figure de droite montre une inégalité en matière de revenu bien moindre que ce qu’entraînaient spontanément la mise en œuvre de son travail ou la détention du capital. Mais une inégalité tout de même, en gros de un à cinq si l’on compare les déciles un et dix. Les stabilisateurs sociaux jouent leur rôle, leur degré d’activation relevant des choix de la société française.
Ce calcul est fait en pleine cohérence avec les comptes nationaux. Ce choix permet de donner une rigueur comptable à la méthodologie retenue et surtout de suivre d’année en année l’évolution des indicateurs d’inégalité tels qu’on les perçoit au travers des différentes définitions du revenu.
Dans la publication citée plus haut, l’INSEE présente aussi le second volet des comptes nationaux augmentés, couvrant cette fois les comptes des gaz à effet de serre émis ou consommés par l’économie française, ce qui permet de calculer l’empreinte carbone du pays. Un outil fondamental pour toute action climatique, qui ne peut se passer d’instruments de mesure. Vox-Fi a évoqué cette réalisation statistique en mai 2024.