Comme le savent tous les financiers avisés , l’une des conséquences la plus remarquée (sinon attendue) de la réforme de l’ IAS 19 ( provision pour départ à la retraite) est la suppression de la méthode dite « du corridor » , ce qui provoque déjà quelques réactions.

1. De quoi s’agit-il ? Rappelons que les sociétés ont actuellement le choix entre 3 options pour comptabiliser leur provision pour engagement de retraite : tout en résultat (très rare), tout en capitaux propres (pour les exercices ouverts depuis le 1er janvier 2006, très usité) ou encore selon la fameuse méthode dite « du corridor »(*) , qui revient clairement à ne pas reconnaître immédiatement une partie de l’engagement , selon un mécanisme d’ écrêtement qui peut s’étaler sur 15 ou 20 ans ( selon l’ âge moyen des salariés).
Cette méthode permet donc de limiter la volatilité de la provision, mais elle a l’inconvénient de faire apparaître au P&L une charge de retraite venant des éléments de l’année et de ceux qui constituent le « rattrapage » de l’impact du stock de sommes « mises hors corridor » les années précédentes.

2. Faut-il craindre la disparition du corridor ? La réponse est non pour trois raisons :

a) Le corridor ne concerne qu’une partie de la nécessaire variation de la provision : celle concernant exclusivement les écarts actuariels , se composant de deux éléments : les changements d’hypothèse (taux d’actualisation, taux de rotation des effectifs, nouvelle législation sociale,…) et les écarts d’expérience (réalité des âges, effectifs et salaires différents de celle anticipée). Rien ne change donc pour la comptabilisation en compte de résultat des éléments récurrents (impact de la désactualisation et du vieillissement essentiellement).

b) De ce fait, l’impact des éléments non reconnus pour les groupes français est (sauf exceptions) assez limité. D’abord parce que nombre d’entre eux ont choisi à partir de 2006/2007 de quitter le corridor, ensuite parce que les chiffres cumulés des engagements non reconnus pour les groupes concernés représentent environ 5% des capitaux propres après I.S. (1% pour L ’Oréal, l’Air Liquide et Lafarge), le pourcentage étant plus conséquent pour EDF (7%) et surtout ALSTOM (26%) à fin 2006 (**).

c) Enfin, la disparition programmée du corridor est une bonne chose pour le programme de convergence IFRS/US Gaap , la communication des charges directement comptabilisée dans les Capitaux Propres faisant l’objet dans chaque référentiel d’un reporting bien cadré : le fameux « S.O.R.I.E. ( Statement Of Recognized Income and Expense) en IFRS, le tableau « Other Comprehensive Income » en US Gaap, dont le nom a d’ailleurs été finalement retenu dans le projet commun de refonte des états financiers IASB/FASB.

(*) Les écarts actuariels nets cumulés des plans à prestations définies (à évaluer pour chaque plan séparément) excédant 10% de la valeur la plus grande entre la valeur actualisée de l’obligation et de l’ actif de couverture en début d’exercice , n’ont pas à être reconnus immédiatement en charges et peuvent être étalés sur la durée restante à travailler des participants au plan.
(**) Source : Rapport E&Y 2007 sur les pratiques IFRS des grands groupes européens.