Vox-Fi a publié récemment un topo sur l’apport de Malthus à la compréhension de l’économie, en montrant les interactions entre la productivité et la population. En bref, il se met en place selon lui une dramatique boucle stabilisatrice : plus de productivité (il parlait de l’agriculture, mais l’argument s’étend à d’autres biens) signifie une capacité à mieux nourrir la population et de la maintenir en meilleure santé ; et donc une hausse du revenu par tête qui entraîne une croissance démographique. En retour, cette dernière réduit le revenu par tête, de sorte qu’on retombe, malgré le progrès technique, au niveau antérieur de vie. Il y a une fatalité malthusienne.

On trouve dans le blog d’un spécialiste étatsunien en économie de la croissance, Dietrich Vollrath, deux graphiques intéressants qui valident la thèse de Malthus, du moins avant la révolution industrielle. Le premier montre la relation assez étroite entre la productivité des terres agricoles et la densité de population sur un ensemble large de pays autour de l’an 1500. La causalité peut être jugée dans les deux sens : d’abord le mécanisme malthusien décrit plus haut, mais aussi et en retour, le fait qu’une pression démographique est un stimulant pour faire des gains de productivité, selon une thèse développée bien plus tard, au XXe siècle, par la remarquable et peu connue économiste-agronome danoise Ester Boserup.

 

Le second est plus parlant encore. Il montre qu’un plus haut niveau de productivité agricole, chose souhaitable en soi, n’a dans un monde malthusien, toujours regardé en l’an 1500, aucun effet visible sur le niveau de vie par tête.

 

Pour comprendre comment nos sociétés modernes ont rompu cette fatalité malthusien le lecteur pourra se reporter au billet cité plus haut de Vox-Fi.