La CSRD : un levier de transformation pour les directions financières

L’introduction de la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) redessine le paysage de la finance d’entreprise. Bien plus qu’une obligation réglementaire, elle offre une opportunité aux directions financières de jouer un rôle central dans la stratégie de durabilité des entreprises et autres organisations. Mais quel est aujourd’hui l’impact réel de cette directive sur le métier du directeur financier, et comment voit-on les entreprises s’y préparer ?
Le directeur financier au cœur de la CSRD : un rôle à « inventer »
La finance doit bâtir les fondations de la CSRD en s’appuyant sur sa capacité à garantir la fiabilité, l’origine et la traçabilité des données. Traditionnellement axées sur des indicateurs financiers (c’est-à-dire en euros), voici que les directions financières doivent intégrer des données quantitatives non financières (kWh, m³, km parcourus, etc.), essentielles pour évaluer l’impact environnemental et sociétal des activités.
Cette évolution exige une connaissance plus profonde des flux de l’entreprise, s’appuyant sur les systèmes d’information existants ou à développer. La réalité du terrain montre qu’ajouter la gestion de la CSRD aux responsabilités actuelles d’un comptable ou d’un contrôleur de gestion n’est pas une solution viable.
Pour motiver ces collaborateurs et leur permettre d’être à l’aise dans ce nouveau rôle, il sera nécessaire de faire évoluer les postes de contrôleur de gestion vers des périmètres environnementaux et sociaux, en leur attribuant de nouvelles ressources, à moins que l’IA ne permette cette transition en allégeant leur charge de travail actuelle, tout en bénéficiant du soutien de la direction générale.
Retour d’expérience : le cas Naos
Naos, un groupe familial basé à Aix-en-Provence, illustre parfaitement comment une entreprise peut s’adapter aux exigences de la CSRD. Comptant 3 100 Salariés et générant 800 M€ de chiffre d’affaires, le groupe, connu pour ses marques Bioderma, Esthederm et État Pur, sera soumis à la CSRD pour l’année 2025.
Dès 2021, Naos a démarré son projet en mesurant l’impact environnemental de ses activités à travers des indicateurs tels que les tonnes de plastique et d’autres composants mises sur le marché. L’internalisation du bilan carbone a été une étape-clé, permettant de commencer à travailler sur des trajectoires de réduction des émissions. En 2023, la collaboration entre les équipes financières et celle de RSE a permis de travailler sur la matrice de double matérialité et d’effectuer une analyse d’écart, avec toujours comme objectif l’internalisation de sa gestion dans le temps
L’objectif final est d’intégrer toutes les données matérielles dans un système d’information intégré de type ERP, permettant la traçabilité de la donnée de la réception de la matière première au data point de la CSRD. Ce module servira de base pour élaborer la « liasse fiscale » CSRD au format XBRL.
Pour réussir la transition
La CSRD doit être perçue comme un outil de pilotage de la performance globale. Un soutien fort de la direction est indispensable pour mobiliser les équipes. De plus, collaborer avec des experts externes, tels que des cabinets de conseil, permet de gagner du temps et de s’assurer de la pertinence des choix stratégiques. Plutôt que de viser une conformité immédiate, il est préférable de progresser par étapes. La CSRD est un processus d’amélioration continue, où chaque avancée compte.
Elle représente ainsi une indéniable opportunité pour que les directions financières renforcent leur rôle stratégique, en étant au cœur de la transformation durable des entreprises. Mais cette transition, il faut le rappeler, nécessite des ressources expertes et engagées, un soutien clair de la Gouvernance et une vision claire des priorités.
La double voire multi compétences Environnementale et Sociétale des financiers de la CSRD est une étape clé qui transforme la fonction Finance et la fait sortir de sa zone de confort.
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