Vox-Fi reprend en résumé la présentation faite par Olivier Blanchard, chef économiste du FMI, des perspectives économiques du FMI parues dans la dernière livraison de Perspectives de l’économie mondiale (20 janvier 2014).
Ces Perspectives portent trois messages principaux :

 

1- La reprise se confirme
Nous prévoyons que la croissance mondiale devrait augmenter de 3% en 2013 à 3,7% en 2014. La croissance dans les économies avancées devrait passer de 1,3% en 2013 à 2,2% en 2014. Et nous prévoyons une croissance dans les économies émergentes et en développement devant passer de 4,7% en 2013 à 5,1% en 2014.

 

2- Cette reprise a été largement anticipée
Nous n’avons révisé notre prévision de croissance mondiale pour 2014 que de 0,1 % par rapport à nos prévisions d’octobre. La raison principale de cette reprise plus forte est que les freins qui l’entravaient se sont progressivement assouplis. L’ombre portée de la consolidation budgétaire diminue. Le système financier est en lente guérison. L’incertitude diminue.

 

3- Il s’agit d’une reprise faible et inégale
Pour les économies avancées, elle est plus forte aux États-Unis qu’en Europe, plus forte dans le cœur de la zone euro que dans l’Europe du Sud. Dans la plupart des économies avancées, le chômage reste beaucoup trop élevé. Et les risques à la baisse demeurent.

 

Tour d’horizon

La reprise est loin d’être uniforme : la croissance américaine semble de plus en plus solide. La demande privée y est forte. À la suite de l’accord sur le budget en décembre 2013, l’assainissement budgétaire, qui a pesé sur la croissance en 2013, sera plus limité en 2014. Ces facteurs nous amènent à prévoir une croissance de 2,8% pour 2014, comparativement à 1,9 % en 2013. Alors que la politique monétaire reste très accommodante, l’accent est de plus en plus mis sur une sortie du régime présent de politique des taux et nous prévoyons une remontée des taux directeurs en 2015.

Le Japon a crû de 1,7% en 2013, et nous prévoyons le même taux de croissance pour 2014. C’est une bonne nouvelle. Mais cette croissance résulte en grande partie de mesures de relance budgétaire et des exportations. Pour que la croissance soit durable, la consommation et l’investissement doivent prendre le relais. Et le gouvernement japonais continuera de faire face au défi de réaliser suffisamment de consolidation budgétaire pour rassurer les détenteurs de la dette tout en ne freinant pas la reprise – un défi difficile à relever.
Les conditions sont de plus en plus favorables au Royaume-Uni et dans les pays au cœur de la zone euro. Les dettes publiques sont sur des trajectoires soutenables et la restriction budgétaire est, à juste titre, en train de ralentir. Les conditions de crédit sont favorables. Cela nous conduit à prévoir une croissance de 2,4 % pour le Royaume-Uni, de 1,6 % pour l’Allemagne, mais seulement de 0,9 % pour la France, où la confiance reste encore faible.

L’Europe du Sud continue à être la partie la plus inquiétante de l’économie mondiale. Nous prévoyons une croissance positive en 2014, mais cette croissance est fragile. D’une part, les exportations sont fortes. Mais d’autre part, la demande intérieure est faible, souffrant d’effets de boucle entre une activité faible, des banques en difficulté, des entreprises en difficulté et de la nécessité d’un assainissement budgétaire. Pour une croissance soutenue, il faudra rompre ces boucles, en s’appuyant à la fois sur la demande interne et externe.

 

Les marchés émergents et les économies en développement

 

Nous prévoyons que la croissance dans les économies émergentes et en développement, bien que plus faible que dans le passé, restera élevée. D’une part, ces pays bénéficient de la croissance plus élevée des économies avancées. D’autre part, la politique monétaire des États-Unis se normalisant, ils devront faire face à un resserrement de leurs conditions financières. Nous croyons que dans la plupart des pays le premier effet l’emportera sur le second. Sur le plan interne, le principal défi est peut-être celui qu’affronte la Chine, qui doit contenir la montée de risques dans le secteur financier sans pour autant trop ralentir la croissance, un exercice d’équilibre délicat.

 

Les risques pour les perspectives

Nous voyons deux principaux risques dans ces Perspectives.

1- À mesure que la reprise s’installe dans les économies avancées, le principal défi sera de normaliser la politique monétaire.

Une partie de cette normalisation attendue transparaît déjà dans les taux d’intérêt longs et dans les taux de change. Mais nous pouvons nous attendre à des mouvements de capitaux complexes et parfois perturbateurs entre les pays pendant quelque temps. Dans cet environnement, ce qu’a montré l’année dernière est que les pays émergents ayant des paramètres macro faibles peuvent être les plus touchés. Ce que nous devons faire pour diminuer ce risque est à la fois une communication claire des banques centrales des pays avancés et des politiques nationales plus saines dans les économies de marché émergentes en situation de stress.

2- Alors que nos prévisions de base sont une inflation faible mais positive dans la zone euro, le risque est que l’inflation se transforme en déflation.

Il n’y a rien de magique dans le chiffre zéro – lorsque l’inflation se tourne vers la déflation. Mais plus bas est le taux d’inflation, et a fortiori plus élevé le taux de déflation, plus c’est dangereux pour la reprise dans la zone euro.
Déflation veut dire hausse des taux d’intérêt réels, poids plus lourd de la dette publique et privée, baisse de la demande et croissance plus faible, et pression déflationniste supplémentaire. Pour éviter ce risque, la politique monétaire accommodante de la BCE reste décisive. De même que le renforcement du bilan des banques. À cet égard, réussir l’exercice en cours d’évaluation des bilans bancaires et de tests de solidité est peut-être la tâche la plus importante à court terme que conduit la zone euro aujourd’hui.

En bref, la reprise s’affirme. Mais beaucoup de travail reste à faire.