Nous avons souvent constaté que, même des personnes ayant un bon niveau en finance, pensaient que l’actualisation des flux de trésorerie futur donnait dans ce cas une valeur post money, dont il convenait de retrancher le montant de l’augmentation de capital nécessaire pour financer l’investissement afin de trouver la valeur pré money sur la base de laquelle se ferait l’augmentation de capital permettant de financer cet investissement.

Comme nous lecteur l’a bien compris à la tournure de notre phrase précédente, ceci est erroné. Mais le doute est permis car on peut se dire que cette valeur ne pourra se matérialiser que si l’investissement est réalisé, et que pour le réaliser il faut procéder à l’augmentation de capital.

Prenons un exemple simple pour démontrer que ceci est un sophisme.

Soit une nouvelle entreprise qui envisage de faire un investissement de 100 dans les prochains jours qui lui rapportera à l’infini un flux de trésorerie disponible de 15 par an. Imaginons que le coût du capital de cet investissement soit de 7%. La valeur actuelle des flux de trésorerie disponible est : – 100 + 15/1,07 + 15/1,07^2 + 15/1,07^3+ . . . =  – 100 + 15/7% = 114.

C’est sur cette base que l’augmentation de capital doit avoir lieu puisqu’il s’agit d’une valeur pré money. Ce qui veut dire que les nouveaux actionnaires apporteront 100 et détiendront 100/(114 + 100) = 47 %, et les actionnaires actuels seront dilué de 100 % à 114/(114 + 100) = 53 %.

Au bout d’un an, les nouveaux actionnaires auront droit à 47 % du premier flux de trésorerie disponible de 15, soit 7. La valeur de l’entreprise (qui n’a ni dette ni trésorerie puisqu’elle a versé en dividende son premier flux de trésorerie disponible) résultera de l’actualisation à l’infini d’un flux de 15 à un coût du capital de 7 %, soit 15/7% = 214. Les nouveaux actionnaires auront un patrimoine composé de 7 de liquidités (le dividende qu’ils viennent de toucher) et de 47 % de 214, soit un total de 107. Ils auront donc gagné en un an, le taux de rentabilité qu’ils exigeaient (7 % sur 100), puisque dans notre exemple simplifié, le réel est exactement conforme aux prévisions.

Si maintenant on avait considéré la valeur des flux de trésorerie disponible de 114 comme une valeur post money, il aurait convenu de la réduire du produit de l’augmentation de capital (100) pour obtenir la valeur pré money sur la base de laquelle réaliser l’augmentation de capital, soit donc 14. Sur cette base, les nouveaux actionnaires apporteront 100 et détiendront 100/(14 + 100) = 88 % et les actionnaires actuels seront dilué de 100 % à 14/(14 + 100) = 12 %.

Au bout d’un an, les nouveaux actionnaires auraient droit à 88 % du premier flux de trésorerie disponible de 15, soit 13. La valeur de l’entreprise serait la même que précédemment, soit 214. Les nouveaux actionnaires auraient un patrimoine composé de 13 de liquidités et de 88 % de 214, soit un total de 201. Ils auront donc gagné en un an, non le taux de rentabilité qu’ils exigeaient (7 % sur 100), mais du 101 %. Ce qui montre bien l’erreur.

La source de l’erreur de raisonnement est de ne pas voir qu’une actualisation de flux de trésorerie disponible tient bien compte du flux négatif que représente l’investissement, et qu’en retranchant ensuite le financement nécessaire de cet investissement, on compte deux fois la même chose, ce qui est une fois de trop.

Notons que, dans cet exemple, on aurait pu se douter que la valeur de 14 était erronée car un investissement rapportant 15 % au lieu de 7 % sur une très longue période (l’infini), et sur un montant de 100, justifie un goodwill élevé.

Article initialement paru dans la Lettre Vernimmen.net n°147 de février 2017, et repris par Vox-Fi avec due autorisation.