Le graphique 1 compare l’évolution des dettes publiques allemande et française, en pourcentage du PIB, depuis la création de la zone euro ; il présente aussi différents scenarii sur les 20 prochaines années.
Nous utilisons un modèle simple de la dynamique de la dette publique. Quatre variables influencent directement la dette publique en pourcentage du PIB. Une hausse des taux d’intérêt augmente ce ratio via la charge de la dette. A contrario, toutes choses égales par ailleurs, une amélioration du solde public primaire (hors charge d’intérêts), une plus forte croissance du PIB réel ou une hausse de l’inflation diminuent ce ratio. Ces variables sont elles-mêmes déterminées par des relations macro-économiques stylisées. L’inflation converge graduellement vers sa cible de long terme (environ 2%). La croissance du PIB est ancrée à moyen terme à la croissance potentielle et est impactée à court terme (via un multiplicateur budgétaire d’environ 0,5) par les ajustements budgétaires dits structurels. Le solde public primaire varie aussi en fonction des fluctuations de la croissance, via sa composante conjoncturelle.
Dans cette approche simple, l’interdépendance des taux d’intérêt avec la croissance et l’inflation, ainsi qu’avec l’endettement public, n’est pas modélisée. Dans le scenario central, les taux d’intérêt futurs sont tirés de la courbe des taux de marché actuels, avec un taux d’intérêt à 10 ans seulement un peu supérieur à 2% à la fin de l’horizon considéré. D’autres hypothèses sur les taux d’intérêt peuvent toutefois être faites (cf. par exemple le scenario de choc de 200pb).
En termes macro, nous supposons une croissance potentielle comprise entre 1 et 1,25% seulement d’ici 2030, puis entre 1,25% et 1,5% ensuite (estimations de la Commission Européenne). Si la croissance potentielle s’avérait plus forte, la dette publique baisserait plus rapidement.
Par ailleurs, le multiplicateur budgétaire moyen peut varier en fonction de la composition des ajustements budgétaires structurels. Cependant, cet aléa n’impacte que le début des simulations.
In fine, l’approche simple retenue ici étant facilement modulable, il est possible de réaliser autant de scenarii que souhaité. Nous en donnons ici quelques exemples.
L’exemple allemand montre qu’une baisse du ratio d’endettement public est possible
En 2010, les dettes publiques française et allemande, exprimées en pourcentage du PIB, étaient très proches. Puis leurs trajectoires ont divergé et, aujourd’hui, la dette publique en France est supérieure d’environ 30 points de PIB au niveau allemand.
L’Allemagne, partant d’une dette publique autour de 60% du PIB en 1999, et après une certaine dérive au début des années 2000, a subi de plein fouet la crise de 2007 : sa dette publique a augmenté d’environ 15 points en quelques années. Mais dès 2010 l’Allemagne a stabilisé sa dette publique puis, dès 2012, l’a placée sur une trajectoire de réduction rapide, de près de 3 points de PIB par an, pour revenir très prochainement sous les 60% du PIB. En Allemagne, les consolidations budgétaires entreprises de façon préventive avant la crise, puis de nouveau rapidement après la crise, sont un facteur clé de la diminution rapide du ratio de dette publique depuis 2010. Grâce à une maitrise des dépenses publiques conjuguée à une croissance assez dynamique favorisant les recettes fiscales, l’Allemagne est revenue rapidement à un excédent primaire après 2010, puis a enregistré des excédents budgétaires globaux (y compris avec les charges d’intérêt). En prévision, elle devrait bientôt inscrire son budget à l’équilibre.
L’effet dit « boule de neige » (graphique 2), déterminé essentiellement par la différence entre le taux d’intérêt nominal et le taux de croissance nominale, est par ailleurs devenu favorable en Allemagne depuis 2010. Le taux d’intérêt moyen de la dette publique allemande a en effet baissé alors que la croissance du PIB nominal est devenue plus vigoureuse : cela a aussi nettement favorisé la décrue du ratio de dette publique.
In fine, l’Allemagne a ainsi regagné des marges de manœuvre substantielles en termes de policy mix.