L’article 103 du traité de Maastricht prévoit expressément, la non-solidarité entre Etats pour ce qui concerne le financement des états membres.

On se rappelle les débats qui en avaient découlé. Pour beaucoup, cela revenait à dire oui à une monnaie unique à condition que chacun gère ses problèmes ! Les électeurs allemands ne voulaient pas payer pour les autres (et l’on pouvait les comprendre).

C’est, en partie la raison pour laquelle, Milton Friedman, prix Nobel d’économie, annonçait que « la force de l’Euro serait jugée à l’aune de son comportement pendant une période de récession ».
Voilà pour le fond du traité.

L’Europe, et la zone Euro en particulier, sont en récession, comment donc est interprété « l’esprit de Maastricht » de l’aveu même de nos amis allemands ?

Interrogé sur le fait de savoir s’il pouvait imaginer un éclatement de la zone euro, Axel Weber, respecté président de la Bundesbank a répondu : « Non, pas du tout (…) Le coût d’une sortie serait exorbitant pour les pays concernés ».

Weber a également indiqué qu’il pouvait concevoir une aide quelconque pour des pays traversant une mauvaise passe financière mais seulement dans des circonstances exceptionnelles et en encadrant strictement cette aide.

Le président de la Bundesbank jouit d’un certain poids en Allemagne comme au sein de la BCE et le fait qu’il n’écarte pas le principe d’une aide, même très encadrée, pourrait impliquer que l’idée en elle-même avance. « Emettre un chèque en blanc, mieux vaut éviter c’est certain », a-t-il déclaré. « Si, dans le cas où la situation empirerait, une aide ciblée pour certains Etats membres devenait inévitable, au vu d’une situation d’urgence exceptionnelle, il faudrait l’assortir de conditions strictes », a-t-il expliqué. On pourrait également envisager, a poursuivi Axel Weber, que des pays financièrement solides accordent à un pays plus fragile un prêt provisoire, assorti de conditions relatives à la politique budgétaire que devrait suivre le pays en question.

L’Allemagne, qui n’a pas ménagé ses efforts ces dernières années pour revenir à un déficit budgétaire quasi nul, n’est pas spécialement enthousiaste à l’idée d’aider d’autres pays de la zone euro qui n’observent pas une discipline budgétaire aussi stricte.

L’Irlande anticipe un déficit budgétaire de 9,5% du produit intérieur brut (PIB) cette année, plus du triple du maximum autorisé par le Pacte de solidarité et de croissance. Le FMI est appelé au secours.
Quand on lui a demandé à nouveau et spécifiquement si la zone euro aiderait des pays en difficulté, Weber a dit : « Cela dépend de la situation concrète. Il doit être clair pour tout gouvernement et toute population qui demande de l’aide que celle-ci doit être attachée à des conditions strictes. Il faut qu’il y ait une garantie de bonne fin et que le pays se remette sur le droit chemin. La forme concrète et les conditions prendraient alors le caractère d’une aide du FMI (Fonds monétaire international) ».

A Berlin, Ulrich Wilhelm, porte-parole du gouvernement, a déclaré à la presse que l’Allemagne « soutiendra absolument la cohésion de l’Europe, la réussite de l’intégration européenne et la cohésion de l’euro ».

Par ailleurs, le ministre allemand des finances a annoncé, certes en catimini, au cours de la semaine dernière, que les pays « forts » pourraient accorder leurs garanties aux pays qui ne réussiraient plus à placer leur dette obligataire souveraine. Néanmoins, ajoutait-il, l’idée d’un « méga Euro-emprunt » n’était pas une bonne idée.

Chacun a compris que le problème majeur de cette crise était celui de l’endettement. Ainsi, dans un premier temps, le sauvetage bancaire revient à transformer de la dette privée en dette publique. Deuxième temps, avec les plans de relance fondés sur l’investissement et très partiellement sur la consommation. Ces plans vont devoir être financés, APRES les nouvelles dettes publiques. Le niveau des Credit Default Swaps de certains pays européens, laissent penser que les investisseurs ne sont plus sûrs de la capacité de remboursement de ces pays. A cet égard, les propos du ministre allemand sont clés dans la construction de l’Europe. Si l’Allemagne et, pourquoi pas la France, (qui d’autre au fait), accordait cette garantie, cela leur donnerait nécessairement un droit de regard sur les politiques publiques des pays en forts déficits. Il faut sauver les apparences, et l’idée de sauvetage par le FMI fait son chemin car, l’aide aux pays incertains ne passerait pas directement des pays plus ou moins vertueux aux autres, mais par l’entremise du FMI et donc à ses conditions. Le FMI jouerait ainsi le rôle du « bad guy » quand les pays apportant leurs garanties joueraient le rôle du « good boy ». Enfin, pourquoi, créer des Euro-Bonds (au sens de 2009 et pas des années 80), alors que, sans bruit, ce type d’emprunt pourrait être lancé par la BEI et de la BERD pour les pays d’Europe Centrale, avec garantie des ationnaires de la BEI et de la BERD respectivement, selon la part de chacun dans son capital ? « Too much ado about nothing » Il est clair qu’une entité politique de supervision de l’usage des fonds publics « européens » serait créée ou activée pour surveiller les efforts des uns et les demandes de l’autre ce groupe de supervision pourrait être l’embryon d’un gouvernement économique et politique aux bailleurs de fonds directs que seraient le FMI… et la BCE. L’Europe aurait donc profité de la crise pour renforcer sa cohésion monétaire et sa cohérence politique. Voilà ce qui s’appellerait « sortir par le haut » !

« Tout ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort ». Cette pensée est de Friedrich Nietzsche. Un Allemand ! On ne saurait mieux dire.

 

Dominique Chesneau