Il y a une réponse simple, qui évite de s’engager dans des opérations spéculatives, toujours incertaines par les temps qui courent. Il suffit justement d’utiliser la propriété première du temps, qui est de toujours courir, même si ce n’est pas toujours en ligne droite.

Le montage est le suivant :

  • temps 1, vous vous endettez auprès de votre banque, selon un contrat stipulant que l’intérêt que vous verserez sera calculé comme d’habitude prorata temporis, mais selon une montre certifiée conforme par la banque et vous-même. Au même moment, vous placez cet argent dans une autre banque au même taux d’intérêt,
  • temps 2, vous vous embarquez pour un aller-retour sur la Lune en emportant l’horloge avec vous et en allant vite, très vite (toute l’astuce est là !),
  • temps 3, dès votre retour sur la Terre, vous allez tranquillement toucher l’argent et l’intérêt couru à la seconde banque pour rembourser la première. Comme l’argent prêté – merci monsieur Einstein – aura travaillé plus longtemps que l’argent emprunté vous empochez la différence.

Pour montrer comme c’est simple, disons que votre vaisseau spatial va à 85 000 km/h, i.e. 23,6 km/s. Cela vous permet l’aller-retour Terre-Lune en 9 heures et 2 minutes ! Ouaouh !

L’effet relativiste est à peine perceptible, de l’ordre de 3 milliardièmes1. Sur le temps du voyage, vous économisez un dix-millième de seconde, c’est-à-dire, pour reprendre l’histoire des jumeaux de Poincaré, celui qui a voyagé se retrouve plus jeune d’un dix-millième de seconde que son jumeau resté sur Terre.

Maintenant, votre combine sans risque : le taux d’intérêt est disons de 5 %. Le temps, c’est de l’argent. Si vous empruntez et replacez 10 M€, ça vous rapporte la jolie somme de 1,57 millionième d’euro. Le tour est joué. Faites le voyage un million de fois, vous avez gagné un repas gratuit de 1,57 euro.

Chère courbure espace-temps, que de festins tu nous prépares ! Thomas d’Aquin récusait les prêts à intérêt en disant : « le temps est un bien accordé par Dieu ; il ne faut pas tirer profit de son écoulement ». Cela vaut peut-être pour un temps rectiligne. Mais que le bon saint nous y autorise quand il devient courbe.

1. Selon la formule qui veut que le temps mesuré dans la fusée s’écoule plus lentement que le temps mesuré au sol, dans la proportion : v est la vitesse du vaisseau, et c la vitesse de la lumière, l’approximation de la formule valant pour des vitesses faibles par rapport à celle de la lumière.