Dans l’ébauche de communiqué disponible sur le site de « The Telegraph », on dispose de plusieurs éléments sur la résolution de la crise qui secoue la zone euro.

La question majeure concerne la Grèce. Elle porte à fois sur la question de la liquidité de la dette publique, mais aussi sur sa soutenabilité. La question de la contagion aussi est au cœur des questions posées. Plusieurs éléments de réponse ont été apportés.

 

Sur la question de la liquidité

Deux points ont été soulignés.

Le premier est l’allongement de la maturité des prêts du fonds de stabilisation européen (EFSF). Celle-ci passe de 7,5 ans à 15 ans. Le coupon passera à 3,5 %. La durée des prêts est allongée et avec un taux d’intérêt plus réduit.

Le secteur financier apporte sa contribution avec la possibilité d’intervenir soit par échange de dette, soit par roulement de celle-ci, soit par rachat. Cela pose immédiatement une question : si les conditions se font sur la base des opérations publiques, c’est-à-dire à un taux de 3,5 %, quelles seront les maturités et les conditions des opérations pour que l’impact soit neutre sur la valeur actuelle nette de celles-ci ?

L’objectif ici est de ne pas peser rapidement sur la Grèce en reportant les échéances immédiates.

 

Sur la question de la soutenabilité

La dette publique est de l’ordre de 150 % du PIB. C’est très important et l’effort pour stabiliser ce ratio est forcément important. Il faut donc trouver le moyen de réduire cette dette en la cantonnant.

C’est ce que devrait pouvoir faire l’EFSF. C’est un des aspects importants de l’accord puisqu’il autorise sous des conditions exceptionnelles cette institution à intervenir sur le marché secondaire. On ne connaît pas la définition des conditions exceptionnelles, mais l’intervention de l’EFSF sur le marché secondaire peut permettre d’acheter une partie de la dette, au prix de marché, et finalement réduire le montant de celle-ci dans les comptes grecs.

L’autre aspect est la volonté mise en avant d’aider la Grèce à retrouver une dynamique de croissance plus favorable. Depuis la fin de l’année 2008, l’activité grecque a chuté de 10 %. Or il ne peut être espéré de stabilisation des finances publiques sans un retour de la croissance. Les fonds structurels européens ont pour objet de faciliter ce retour.

 

Sur les effets de contagion

L’EFSF aura aussi la capacité d’intervenir de façon préventive pour éviter de se retrouver dans une situation inextricable. Il pourra aussi aider les États à recapitaliser les banques en difficultés, y compris pour les pays qui ne sont pas dans un programme d’aide, on pense ici à l’Espagne dont on connaît la fragilité du secteur bancaire (se pose néanmoins la question de savoir qui décidera du besoin de recapitalisation).

L’EFSF aura aussi la capacité d’intervenir sur les dettes du Portugal et de l’Irlande limitant ainsi les effets de contagion.

 

Les autres points

Il est rappelé l’objectif de réduction des déficits sous le seuil de 3 % du PIB à l’horizon 2013, au plus tard, à l’exception des pays qui bénéficient d’un plan d’aide et pour lesquels un calendrier a déjà été mis en place.
La remise en place du pacte de stabilité, des mécanismes contraignants vers l’équilibre budgétaire et la surveillance des politiques mises en place sont aussi rappelés.

 

Quel rôle pour la BCE ?

Cette question n’est pas explicitement abordée même si l’on sait que Jean-Claude Trichet a participé à la négociation entre Angela Merkel et Nicolas Sarkozy à Berlin le 20 juillet.

L’ensemble de ces mesures n’a pu être accepté qu’avec l’accord de la BCE et pourquoi pas son éventuelle intervention pour garantir qu’il n’y aura pas de défauts au sein de la zone euro (voir le point 6 du communiqué).

 

Conclusion

Les questions relatives à la liquidité et à la solvabilité des finances publiques de la Grèce ont trouvé des éléments de réponse dans le plan ainsi formulé. Cela suppose un travail de surveillance pour que les mesures mises en place s’inscrivent dans la trajectoire appropriée.  L’EFSF pourra jouer le rôle de coussin amortisseur pour éviter que des tensions ici ne créent une contagion là. Même s’il reste des précisions à avoir sur ses interventions, il est clair que l’orientation prise permettra de limiter la diffusion des risques.

Cela signifie qu’avec un rôle plus important pour l’EFSF, et une surveillance et des engagements plus marqués sur le plan budgétaire, le point d’équilibre institutionnel a probablement changé en zone euro. Ce n’est probablement pas suffisant, mais la voie est tracée pour une situation où la politique budgétaire serait davantage conditionnée par l’environnement européen et les contraintes qui s’y attachent que par les conditions strictement nationales.

On voit ainsi une économie de la zone euro qui crée les instruments et les modes d’intervention qui permettront de réduire les tensions du moment, mais cela s’accompagnera d »une contrepartie institutionnelle avec un transfert partiel de souveraineté sur l’orientation de la politique budgétaire. Au-delà de la question grecque, ce changement d’équilibre est essentiel car il doit avoir pour vertu de réduire la possibilité de crise. La question est de savoir si les Européens se doteront des moyens nécessaires pour faire respecter ces engagements. On se souvient de la façon dont le pacte de stabilité a été exécuté au début des années 2000.
[quote type= »center »]Faire de la consolidation budgétaire et espérer une croissance rapide ne sont généralement pas compatibles. Cela va forcément rendre plus complexe l’équation menant à l’équilibre budgétaire.[/quote]
Le dernier point sur ce plan est la vitesse à laquelle les déficits publics doivent être réduits. Les pays de la zone euro se sont engagés à respecter ce schéma. Cela veut dire que la demande interne qui était déjà une source de fragilité dans la dynamique de croissance de la zone euro va rester fragile. La consolidation budgétaire va se traduire par une croissance plus réduite et des déséquilibres toujours flagrants sur le marché du travail. L’objectif de croissance de 2011 restera proche de 2 % (mais la faiblesse des enquêtes ce matin suggère un ajustement à la baisse) et celui de 2012 sera revu à la baisse, sûrement aux alentours de 1,5 %. Faire de la consolidation budgétaire et espérer une croissance rapide ne sont généralement pas compatibles. Cela va forcément rendre plus complexe l’équation menant à l’équilibre budgétaire.

Les points mis en avant dans l’ébauche de communiqué permettent de réduire les tensions immédiates et de donner du temps aux Européens pour organiser leurs institutions. Cependant, n’imaginons pas que toutes les questions soient réglées. La gestion des dettes publiques est une problématique de longue haleine, elle contraindra encore longtemps la dynamique des pays de la zone euro.

 

Philippe Waechter