Les activités des agences de notation ont été montrées du doigt à l’occasion de la crise financière que nous connaissons depuis 18 mois. Leurs détracteurs ont accusé leur modèle économique, la qualité de leurs recherches « sur-place » et  « sur-pièce » et enfin leurs algorithmes d’évaluation.
Les différents projets de remédiation aux Etats-Unis et en Europe vont faire l’objet d’âpres discussions lors des discussions avec les parlementaires américains, européens et nationaux. Il est difficile d’estimer précisément le contenu final de la règlementation.
Dans cet univers incertain, quels éléments poussent un quatrième acteur (Coface) à étendre ses activités sur ce créneau ?

De nombreuses raisons stratégiques ont récemment été évoquées par Jérôme Cazes (directeur général) et l’on ne peut qu’encourager le lecteur à se reporter à son fidèle Google pour étancher sa soif d’information, mais citons, néanmoins quelques points principaux :
– un tarif de notation bien inférieur à celui des concurrents : puisque Coface mesure tous les risques qui rentrent et sortent de son bilan, le coût de cette nouvelle activité est (relativement) marginal ; 
– de plus, rendre publique la note (pour l’entreprise notée ou pour un « investisseur » intéressé) oblige l’entreprise notée à donner davantage d’informations si elle n’est pas satisfaite par sa note. Le système, renforçant la transparence, semble vertueux et, concurrence aidant, devrait forcer le biotope des Big 3 à évoluer, pour le bien de tous ;
– Coface, en tant qu’assureur, sera donc contrôlé par le nouvel organisme de supervision français reportant à un observatoire présidé par un des gouverneurs de la BCE. Cet élément différenciant par rapport aux autres Big 3 est rassurant.

Un argument  me semble supérieur à tous les autres. Le modèle économique de l’agence de notation Coface est de trouver sa rémunération chez les investisseurs ou les possesseurs du risque et non plus chez les émetteurs de risque, tout en ayant un  lien entre la notation et l’assurance-crédit. En d’autres termes, si Coface se trompe dans les évaluations du risque des 18 000 établissements suivis, les primes éventuelles qu’elle demandera ne lui permettront pas de couvrir les défauts… mais ses clients seront couverts quoi qu’il arrive.

Est ainsi créé un risque financier partagé entre le « notateur » et ses clients.

A n’en pas douter, l’initiative de Coface ne sera pas unique : on peut imaginer qu’après les errements des agences de notation de référence, les banques reforment des équipes d’analyse de crédit comme au bon vieux temps ! Et cette recherche interne revivifiée pourra être « vendue » à la communauté financière (un cas d’auto-régulation vertueuse du capitalisme !).

Plutôt que de se livrer à un lobbying indécent pour que rien ne change, les trois « anciennes » seraient bien avisées de consacrer leur énergie à évoluer plutôt qu’à tenter de  mourir guéries !

 

Dominique Chesneau