Quel partage en France entre salaires et profits ?

Une note statistique de la direction du Trésor, sous la plume de Charles Gendre et Yann Thommen, fait un utile topo sur le partage salaire / profit. Précisément, comment évolue la part de la masse salariale au sens large (y compris charges sociales notamment) dans la valeur ajoutée, c’est-à-dire la richesse créée chaque année – ou encore le PIB ? Par différence, comment évolue celle de la rémunération du capital, entendu comme l’excédent brut d’exploitation, un concept de la comptabilité nationale proche de l’EBITDA de la comptabilité privée ?
Trois faits marquent l’œil.
Fait 1 : En gros, le partage entre salaires et profits est étonnamment stable sur la durée : deux tiers contre un tiers (graphique).
Fait 2 : Ce qui vaut pour les salaires bruts vaut pareillement pour les salaires nets (hors charges sociales) : globalement constants en part de la valeur ajoutée.
Si l’on compare à la loupe l’année 1990 et l’année 2023, toujours sur les seules entreprises non financières, on observe que les cotisations sociales, tant à la charge des employeurs que des salariés, ont légèrement baissé en part de la valeur ajoutée, passant de 27,5 % à 23,6 %, sous l’effet en partie des exonérations de charges pour les bas salaires, ceci étant compensé par la mise en place de la CSG-CRDS.
On constate une fois de plus que le poids des charges sociales est toujours très important : en gros 42 % de la rémunération brute (ou près des trois quarts des salaires nets).
Fait 3 : Un profit stable et compatible, sur trente ans, avec une forte baisse des frais financiers et une croissance des dividendes.
C’est ce que montre ce dernier graphique, sur le champ de l’ensemble de l’économie et non des seules entreprises non financières. En 1990, les entreprises étaient davantage endettées et à des taux plus élevés qu’aujourd’hui : la part des intérêts dans la valeur ajoutée s’élevait à 6 %. En 2023, elle n’est plus qu’à 1 %. Créanciers et actionnaires ont donc vu leur poids relatif dans le partage du revenu fortement bouleversé.
Par contre, les dividendes, bien sûr beaucoup plus volatils que l’EBE, ont crû de deux points en part de la valeur ajoutée : de 3 % à 5 % (mais ils étaient également à 5 % en 2007). Les auteurs ne disent pas ce qu’il en est des rachats d’actions qui sont un mode beaucoup plus utilisé qu’autrefois de distribution du profit.