Le contrôle de gestion a vécu ! Fonction phare dans les années 1970 avec le développement du contrôle de gestion industriel, nous assistons en fait depuis quelques années à son lent déclin avec notamment : la disparition de l’industrie (moins de 15 % de nos activités en France), le transfert du contrôle de gestion de l’industrie vers les activités de services sans réelle adaptation, l’automatisation des processus budgétaires, la performance des outils d’analyse et la standardisation et l’accès de l’information grâce aux « ERP », la « vulgarisation » des analyses, etc. Tout un chacun peut maintenant se vanter de « faire » du contrôle de gestion comme M. Jourdain faisait de la prose sans le savoir…

Le contrôle de gestion doit donc se réinventer sous peine de n’être réduit qu’à une simple fonction budgétaire, certes importante pour l’entreprise, mais pas créatrice de valeur sur le long terme. Alors, certains vous vanteront la fameuse méthode ABC/ABM, et là tout sera dit ; le Sésame du Contrôle de Gestion est sorti, mais pourquoi n’est-il pas appliqué ou si peu dans les entreprises ? Qui, en dehors de quelques consultants, peut se vanter d’avoir investi le temps et les moyens nécessaires à sa mise en place ? Ce concept théorique est certes très intéressant intellectuellement, mais ne peut donner le renouveau nécessaire à cette fonction. D’autres vous diront que le contrôle de gestion demeure ce fameux copilote de l’entreprise avec son tableau de bord, ses budgets et ses variances. Quel chef d’entreprise oserait dire qu’il gère son entreprise sans budget, sans analyse des variantes, sans prévision annuelle, sans tableau de bord tout simplement ? Ouf, la fonction est sauvée ! Mais dans les faits, les informations viennent des opérationnels et les systèmes d’information peuvent les restituer dans le format idéal auprès des opérationnels, maintenant tout à fait aptes à faire des analyses poussées de variante de consommation de la matière ou de la main-d’œuvre. Resterait-il alors les analyses prévisionnelles ? Mais là encore, la culture des chiffres est si présente que la plupart des fonctions de l’entreprise se débrouillent désormais seules. Alors, essayons de nous rassurer, il reste encore la consolidation des fameuses données prévisionnelles (ou « forecast »), et cela personne ne peut l’enlever aux contrôleurs de gestion, avec leur vision globale de l’entreprise. Mais pour combien de temps encore ?

On peut se mettre en bandeau devant les yeux, mais force est de constater que d’autres fonctions des directions financières ont habilement su tirer avantage des problématiques des dix dernières années, notamment par une expertise accrue : la direction comptable avec la complexité des normes comptables (notamment IFRS) est devenue l’expert incontournable pour mieux comprendre les effets induits d’un contrat ou des impacts d’une règle comptable sur le compte de résultat ; la direction des risques (ou du « risk management »)  a su prendre pied dans un environnement qui essaye de maîtriser et de réduire le moindre risque ; la direction de l’audit interne a d’abord pris en charge l’ensemble des processus financiers, puis opérationnels, toujours dans le but avoué d’une meilleure maîtrise des risques. Le contrôle de gestion aurait-il raté ces opportunités par manque de réalisme ou n’aurait-il pas eu les compétences suffisantes pour tirer parti de celles-ci ?

Si, au-delà de ces changements organisationnels, vous intégrez que les systèmes d’informations peuvent restituer n’importe quelle information telle que souhaitée ou que la culture financière est très largement répandue dans l’entreprise (les managers opérationnels pilotent efficacement leurs outils de mesure ou KPIs), il semble nécessaire de repenser ou même de réinventer la fonction de contrôle de gestion. Elle ne doit pas rester figée dans son périmètre historique, sous peine de disparaître ! Exagéré ? Peut-être, mais n’oublions pas que cette fonction est encore une exception à la française dans un monde anglo-saxon dominé par le « controlling » et le « financial planning » !

Mais alors quel pourrait être l’avenir de cette fonction institutionnalisée comme «copilote de l’entreprise », dans nos environnements économiques en pleine mutation et nos organisations matures à la recherche de la performance court-terme ? Nul doute que le Blog et ses lecteurs sauront nous donner la réponse…