L’Europe de l’Ouest avait rattrapé les États-Unis en termes de productivité pendant les 40 années de l’après-guerre. Depuis une vingtaine d’années, particulièrement suite à la grande crise financière et à la crise du Covid, l’Europe semble perdre pied. Une équipe du FMI se penche sur la question, avec quelques constats, déduits d’une étude intéressante parce qu’elle a été faite à un niveau micro-économique, en regardant les comportements des entreprises des deux côtés de l’Atlantique.

Les faits d’abord. En numéro 1, les firmes cotées montrent des gains très différents selon qu’elles opèrent en Europe ou aux États-Unis. En rouge sur le graphique ci-dessous qui montre l’évolution de la productivité, les firmes étatsuniennes ; et en bleu les européennes, ceci en base 100 en 2005. L’écart le plus grand s’observe pour les entreprises de la tech (trait plein).

 

Numéro 2, le taux d’entrée, c’est-à-dire de nouvelles firmes, est comparable aux États-Unis et en Europe. Mais avec une différence majeure : les États-Unis dépassent l’Europe en création de nouvelles entreprises avec un effectif supérieur à 10 personnes. Et le niveau de R&D pour ces jeunes entreprises est très fortement plus élevé pour les entreprises étatsuniennes.

Fait 3, les entreprises européennes ont tendance à survivre sans croissance, alors qu’aux États-Unis, le phénomène de « monte ou tombe » (up-or-out) est beaucoup accentué. Une entreprise disparaît vite si elle n’arrive pas à atteindre un bon rythme de croissance, ce qui témoigne d’un niveau de dynamisme industriel bien inférieur. Par exemple, au bout de 25 ans d’existence, une entreprise a le double d’effectifs si elle opère aux États-Unis plutôt qu’en Europe.

Tout ceci, avec une disparité très forte entre pays européens, bien plus élevée qu’entre États de l’Union aux États-Unis, ce qui n’aide pas non plus au mouvement d’ensemble.

 

Causes et remèdes

Le sujet est maintenant bien couvert par les récents Rapports Letta et Draghi. On identifie également dans la présente étude le rôle tenu par un marché encore très fragmenté en Europe et une dépendance moindre au financement par actions. Les entreprises leaders ont moins de capacité à se développer. L’étude du FMI tente un chiffrage de ce que représentent les barrières commerciales intra-UE : elle arrive au chiffre de 44 % (sans préciser si ce chiffre est cohérent avec un droit de douane de 44 %, ce qui serait énorme). Le chiffre atteint même 110 % pour le secteur des services.

S’agissant des start-ups, l’étude constate un réservoir plus faible de cadres de haute qualité de même qu’une disponibilité moindre de capital-risque, particulièrement pour celles des entreprises qui investissent davantage dans des actifs incorporels difficiles à garantir.

Toutes choses connues et répétées maintes fois, mais qui prennent une importance particulière aujourd’hui dans le contexte géopolitique dégradé entre l’Europe et les États-Unis.