Voici un graphique montrant l’évolution de la part des personnes ayant un emploi. Il est tiré d’un papier de David H. Montgomery (Who’s not working? Understanding the U.S. aging workforce).

Les classes d’âge de 16 à 19 ans et de 20 à 24 ans affichent la plus forte baisse de la part de la population entre mars 2000 et mars 2022. Cela s’explique en grande partie par le fait qu’un nombre croissant dans ces catégories passent plus de temps à l’école ; en outre, ils sont moins susceptibles de travailler pendant leurs études, que ce soit à temps partiel ou à temps plein.

Par contre, les plus de 55 ans sont de plus en plus actifs. Cette évolution s’explique en partie par l’amélioration de la santé des seniors aux États-Unis, en partie sous l’effet d’incitations à travailler plus longtemps mis en place par la sécurité sociale (et d’autres plans de retraite) et par le souhait (en particulier chez les travailleurs ayant fait des études supérieures) d’accepter le compromis d’une retraite plus tardive en échange d’un pécule plus important au moment de cette retraite.

Le mystère réside dans la diminution de la part des emplois parmi les travailleurs que les statisticiens officiels appellent aux États-Unis les « travailleurs d’âge mûr ou médian », c’est-à-dire les personnes âgées de 25 à 54 ans. Elles sont franchement mystérieuses. Il ne s’agit pas d’un phénomène à court terme lié à la pandémie. Il tient principalement à un déclin de l’activité professionnelle chez les hommes, et ceci depuis des années, ce qui exclut qu’il puisse être expliqué par un changement spécifique de législation ou par le parti politique au pouvoir.

Les théories plausibles suggèrent qu’au cours d’une période d’inégalité salariale croissante, les travailleurs qui se sentent coincés au bas de l’échelle salariale peuvent abandonner le travail formel, tout en continuant dans de nombreux cas de travailler au noir. En outre, la proportion d’hommes adultes qui ne sont pas mariés ou qui ne cohabitent pas est élevée, et on observe que ces hommes sans partenaire ont tendance de plus en plus à vivre au domicile de leurs parents. Le fait que ces adultes dans la force de l’âge soient déconnectés de la population active représente une perte de production économique. Plus important peut-être, il s’agit d’une population très nombreuse – qui n’a pas forcément quitté le marché du travail, mais se contente d’emplois mal rémunérés. Elle vit ses années de vie active avec frustration et résignation par rapport aux aspirations qu’elle avait pu avoir plus tôt dans sa vie.

 

Ce billet est la traduction, avec une édition légère, du blog ami « The Conversable Economist » du 2 mars 2023, avec l’autorisation de son rédacteur Timothy Taylor.