Ainsi va la blague boursière pour justifier que la Bourse privilégie le court terme au long terme.
La question est : est-ce bien vrai ? Y a-t-il un avantage systématique donné au court terme par les marchés financiers ? Y a-t-il myopie des investisseurs, dont la conséquence serait une pénurie de fonds pour les projets dont le retour est éloigné, même quand ils se révèlent les plus rentables et les plus efficaces socialement sur la durée ? Y a-t-il rétrécissement de l’horizon boursier ?

On reconnaît dans ces questions la critique d’un capitalisme devenu excessivement financier et court-termiste. Ce qu’on appelle désormais le « quarterly capitalism ». Mais est-ce simplement le bruit qui provient des marchés ou un mouvement de fonds qui oriente les efforts d’investissement à l’excès sur les projets à pay-back immédiat ?

Trancher dans un sens ou un autre n’est pas simple. Les preuves restent fragmentaires. On perçoit bien la tyrannie du court terme, mais on voit tout autant que les marchés financiers sont par exemple capables de lever des fonds pour équiper les pays en réseau de fibre optique ou financer la recherche pharma ; ou même, pourtant au paroxysme du court-termiste comme lors de la bulle Internet ou de l’actuelle probable bulle sur Internet 2.0, orienter des masses de fonds considérables sur des investissements très problématiques (LinkedIn, qui vient d’être mise en Bourse, est valorisée à 9 Md€, soit 40 X son chiffre d’affaires !).

Nous proposons à nos lecteurs un papier intéressant – et un petit peu technique – qui semble démontrer qu’il y a réellement un biais court-termiste. Précisément, les taux d’actualisation pour les flux de trésorerie éloignés sont plus forts que les taux pour les flux rapprochés. Il est écrit par deux économistes réputés de la Banque d’Angleterre. Voir : Haldane, Andrew G., and Richard Davies, 2011, « The Short Long », Bank of England, présenté au 29e colloque de la Société universitaire européenne de recherches financières, Bruxelles, May 2011.