L’Association française des credit managers et conseils (AFDCC) vient de publier la 8e édition de son enquête annuelle sur les comportements de paiement. Cette étude a pour objectif d’identifier des tendances fortes dans l’évolution des comportements des entreprises face aux délais de règlements ou aux nouvelles réglementations comme, par exemple, la Loi de modernisation de l’Économie (LME).

 

Les faits marquants en 2010

L’édition 2010 de cette enquête confirme les effets positifs de la LME sur les délais de paiement des entreprises. Dans le même temps, les retards de paiement (c’est-à-dire les délais au-delà du terme contractuel du paiement) ne diminuent pas et l’outil législatif mis en place, à savoir les pénalités de retard, reste très peu exploité. Pourtant, 60 % des sondés sont favorables à la mise en place d’une telle obligation.

L’enquête révèle, par ailleurs, le renforcement du rôle et de l’image du crédit manager. Elle note une augmentation des délais de règlements pour le secteur public et des projets de dématérialisation de plus en plus nombreux.

 

Évolution du Days sales outstanding (DSO) au cours des 8 dernières années

Le graphique ci-après présente très nettement l’impact de la LME sur les délais de règlement clients des entreprises interrogées. 64 % des entreprises constatent encore une diminution de cet indicateur par rapport à 2009. Pour 28 % d’entre elles, les délais sont stables (mise en place progressive, mais durable de la loi ou effet direct des accords dérogatoires en place jusqu’en 2012 ?). Les dérogations, encore autorisées mais limitées jusqu’à 2012, laissent penser que cette tendance sera identique dans la prochaine étude.

L’AFDCC a interrogé les entreprises sur le nombre de jours de DSO gagnés. Les résultats se présentent dans le graphe ci-après. 55 % des entreprises constatent une diminution de cet indicateur supérieure à 10 jours. Ces chiffres peuvent sembler très importants et découlent directement de l’effet LME. À notre avis, ils tendront à se réduire dans les prochaines enquêtes.

 

Progression des retards de paiement

La LME définit un cadre contractuel pour les délais de règlement. En 2009, beaucoup craignaient que la mise en place de cette loi provoque une augmentation massive des retards de paiement par rapport à la date mentionnée sur les factures. Or, en 2010, 74 % des entreprises interrogées ne constatent pas d’augmentation de ces retards. Les effets de la LME sur les délais de paiement contractuels ne sont donc pas « parasités » par une augmentation des retards.

Pour confirmer ce point, nous avons demandé aux entreprises le nombre de jours de retard constatés. Pour plus de la moitié des sondés, ces retards sont inférieurs à 4 jours.

 

Impact des accords dérogatoires

À travers son enquête, l’AFDCC a cherché à savoir quelle était la part des entreprises sondées bénéficiant d’un accord dérogatoire.35 % des sondés ont répondu positivement.

Parmi ces entreprises, seules 19 % d’entre elles considèrent que ces accords sont pénalisants en termes de compétitivité par rapport à d’autres secteurs d’activité.

 

Les pénalités de retard, une pratique encore peu usitée

La pratique des pénalités de retards reste toujours très timide alors que la LME a indiqué clairement en augmentant les taux que les pénalités constituaient un levier pour obtenir le paiement à l’échéance. En 2008, 55 % des credit managers déclaraient réclamer de manière récurrente ou occasionnelle les pénalités de retard. En 2009, ils étaient 57 % et en 2010, ils sont 59 %.

La chute du taux d’intérêt légal, l’absence d’obligation de facturation, le contexte économique difficile et l’absence de contrôle sont autant de facteurs qui ne favorisent pas l’application des pénalités.

La proportion d’entreprises encaissant les pénalités réclamées de manière systématique ou occasionnelle progresse encore cette année par rapport à la dernière étude : 82 % en 2010 contre 79 % en 2009 et 70 % en 2008. L’absence d’obligation légale de facturation ou d’encaissement des pénalités fait de cet outil au service des entreprises une sorte de « moyen de pression » ou « un élément de négociation » entre un fournisseur et son client.

 

Les pénalités de retard : entre obligation et réalité

Nous avons cherché à déterminer quels taux de pénalité pratiquent les entreprises. Le premier résultat surprenant est que 5 % des entreprises ayant répondu pratiquent un taux inférieur au minimum légal : 1,95 % (3 fois le taux d’intérêt légal). La grande majorité (68 %) se situe entre le minimum légal et le taux supplétif (BCE + 10 points soit 11 %). 27 % des entreprises tout de même pratiquent un taux supérieur à 12 %.

En France, il n’existe aucune obligation légale de facturer les pénalités de retards. La loi indique juste que « les pénalités de retards sont exigibles sans qu’un rappel soit nécessaire le jour suivant la date de paiement mentionnée sur la facture ». La LME a augmenté les taux (minimum et supplétif), mais n’a pas modifié ce point. Dans les entreprises réclamant les pénalités, nous avons donc cherché à connaître dans quelle proportion les entreprises les encaissent. La majorité des sondés (60 %) les encaissent plus d’une fois sur deux. À l’inverse, 40 % des sondés ne les encaissent que très rarement (moins d’une fois sur quatre).

 

Impact de la LME sur le BFR

Une grande majorité des entreprises (64 % en 2010, 59 % en 2009 constatent un impact positif de la LME sur leur besoin en fonds de roulement.

À l’inverse, elles sont seulement 10 % à subir un impact négatif dans le jeu entre les délais le règlement clients et fournisseurs.

 

Solutions aux besoins de financement potentiels

On retrouve cette année les mêmes tendances que dans la précédente enquête avec des financements trouvés principalement par fonds propres, par la dette bancaire ou par le poste clients. On notera toutefois que 10 % des entreprises se sont financées en mobilisant leurs stocks.

 

Nouvelle directive européenne : impact sur la situation en France

Enfin, pour 85 % des entreprises interrogés, la mise en place de la directive européenne sur les délais de paiement n’entraîne pas de renégociation sur le territoire national.