Le Brexit voté le 23 juin 2016 mais officialisé le 31 janvier 2020, a rendu nécessaire l’adaptation des opérateurs et des régulateurs des back offices des marchés financiers européens, pendant une période transitoire devant s’achever en 2025. L’organisation et les pratiques des chambres de compensation (CCP) des devises (Forex), de titres d’Etat (repo’s), des actions, des produits de taux (obligations…) et des instruments dérivés (options, swaps, warrants…) ont été modifiées afin de permettre le transfert de certaines opérations de la City (deuxième place mondiale) vers les autres places financières européennes (LCH Clearnet Paris, Eurex Clearing, Euro CCP, EMCF, SIX x-clear, STET). La compensation doit être distinguée de la conservation des titres assurée notamment par Euroclear Bank ou Clearstream. Les chambres de compensation ont principalement pour rôles d’effectuer les règlements-livraisons, mais aussi de vérifier la solidité financière et de calculer les positions des acheteurs et des vendeurs, de s’assurer des garanties (collatéraux), d’appeler les marges (garanties) et d’assurer la contrepartie en cas de risque de défaut (waterfall). Les transferts entre places ont principalement affecté les marchés des repo’s, des produits d’equity et de taux, mais ont peu modifié le marché des dérivés OTC, qui reste dominé par la City. Les mutations ont affecté la compensation multilatérale des flux (netting), mais surtout, celle des dérivés OTC (ou gré à gré) dans lesquelles les CCP prennent le plus de risques.

 

Ces marchés sont notamment régis par le règlement EMIR (2012) et la directive MiFID II (Markets in Financial Instruments Directive) de 2016, dont l’objectif est de renforcer leur stabilité, leur transparence et leur efficacité, afin notamment d’éviter le développement du shadow banking [1]. Ils sont encadrés par l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA), qui a classé les places en fonction de la nature de leurs risques (plus ou moins systémiques), de la profondeur de leurs marchés, de la solidité de leurs contreparties et des coûts de leurs services. Elle a comparé les différentes places mondiales, réalisé des stress-tests, délivré des agréments aux places européennes et conclu des accords de coopération (équivalences) avec 15 chambres non européennes, dont celles de New York et de Chicago.

 

Un des principaux opérateurs généralistes des CCP est le London Stock Exchange Group plc, qui est une société de bourse et d’information financière basée à Londres, détenant des participations dans la Bourse de Londres, Refinitiv, LSEG Technology, FTSE Russell et des participations majoritaires dans LCH et Tradeweb. Son dirigeant constate que les compensations sur le Forex restent dominées par le dollar américain (plus de 50 % en volume), suivies par l’Euro (25 %) et de 23 autres devises. Il observe que la concurrence est de plus en plus vive entre les CCP et que des regroupements sont encore possibles au sein de l’Union européenne. Il se félicite de la réactivité des opérateurs mais regrette les durées excessives des validations de nouveaux produits par les superviseurs. Les banques au service des vendeurs et des acheteurs ont dû parallèlement modifier leurs contrats, réviser leurs pratiques et assimiler de nouvelles compétences en s’inspirant notamment des grandes banques de la City.

 

Cet article a été rédigé à partir de la table ronde organisée par l’AEFR le 24 mars 2021 réunissant des experts des chambres de compensation (CCP) européennes.

 

[1] Mellios C., Pluchart J-J. (2014), Le shadow banking, Eds Eyrolles.