Les chefs d’Etat et de gouvernement se sont réunis ce jeudi 11 février pour arrêter une position commune sur la crise de la dette grecque. Le communiqué final indique que « les pays européens sont prêts à prendre des mesures coordonnées de grande ampleur » sans les annoncer. Nos gouvernants semblent donc avoir décidé de gagner du temps, afin de permettre de prolonger les réflexions en cours au sein de chaque gouvernement et des parlements nationaux, car l’ambiguïté des textes interdit toute solution « juridique » et impose une volonté politique partagée. L’heure n’est apparemment pas encore venue d’en faire preuve publiquement !

Dans l’urgence, on note une certaine réticence des parlementaires allemands à engager sous une forme ou sous une autre la signature de leur pays. En effet, quelle légitimité aurait un ou des Etats européens à fixer à un autre Etat souverain des conditions aussi sévères que celles de diminuer les salaires de 25 %, d’augmenter l’âge de la retraite à 70 ans… Face aux désordres sociaux qui s’ensuivraient, la tentation du gouvernement grec serait grande de justifier sa politique de rigueur en accusant Bruxelles, et l’assistance européenne pourrait avoir été versée dans le fameux tonneau des Danaïdes !

Si est fait le choix du recours au FMI, la potion sera amère, mais Monsieur Strauss Kahn, fort du soutien de ses administrateurs et n’étant pas soumis à des échéances électorales proches, pourrait tenir bon face à l’ire du peuple grec. Après tout, c’est sous contrainte du FMI que la Belgique a réduit son taux d’endettement à un niveau jugé raisonnable pour monter dans le train de l’Euro dès 1999 !

La pire solution avancée au début de la semaine consisterait en une intervention mixte avec une répartition des rôles : le financement à court terme à l’Europe et la médication de fond au FMI. En d’autres termes, l’Union ne serait pas capable de poser un diagnostic, ni de proposer les remèdes, mais elle « paierait » !

Gagner du temps conduit le peuple et le gouvernement grecs à assumer les causes du problème et les plans de rigueur qui s’ensuivront.

Institutionnellement, l’idée de créer une agence de la dette européenne apparaît « évidente »… pour autant qu’existe un ministre des Finances qui lui donnerait des instructions et auquel elle rendrait compte. Si tous les pays doivent s’aligner sur le plus vertueux du point de vue de la gestion des finances publiques, comment oublier qu’une politique doit être votées par une représentation nationale et appliquée par des élus munis du mandat populaire correspondant. Quelle institution européenne existante a-t-elle la légitimité pour mettre en œuvre des mesures sur le territoire de l’Euro ?

Si l’alternative entre une intervention de l’Union européenne et une assistance du FMI n’existe pas, pourquoi ne pas trancher ce nœud gordien en annonçant simultanément un programme grec, un plan européen à moyen terme et une intervention du FMI à court terme ?
La Grèce annoncerait seule des mesures musclées aussitôt acceptées par le FMI, qui conditionnerait son soutien au respect scrupuleux du calendrier, pendant que les chefs d’Etat de la zone Euro proposeraient un plan de renforcement de l’Europe. La Grèce resterait maîtresse d’elle-même, le FMI ne serait pas nécessairement un exécuteur des basses œuvres, l’Allemagne n’aurait pas à avancer de fonds et l’Europe trouverait en elle les moyens de son rebond et éclairerait le bout du tunnel.

Cette crise est difficile à gérer car, plus qu’économique et financière, elle ouvre le débat, qu’il aurait fallu tenir tôt ou tard, de la souveraineté en Europe…Vaste programme !