Les faits

Une ordonnance sera bientôt publiée, après délibération en Conseil des ministres, visant à la création de la nouvelle ANC (Autorité des Normes Comptables), qui remplacera à la fois l’ancien Conseil National de la Comptabilité (CNC) et le Comité de Réglementation Comptable (CRC).
Cette nouvelle ANC édictera les prescriptions comptables (fonction de normalisateur national), donnera son avis sur des projets élaborés par d’autres autorités nationales et sur les projets IFRS à venir (« Discussion Paper » ou « Exposure Draft ») et assurera la coordination des travaux « théoriques et méthodologiques » en la matière.
Elle comprendra un collège (16 membres, dont un représentant de l’AMF et de la Commission Bancaire), des commissions spécialisées et un comité consutatif. Un commissaire du gouvernement (directeur du Trésor) siègera sans voix délibérative auprès des trois instances précédemment citées et pourra demander une seconde délibération du collège.
L’ANC adoptera des règlements, publiés au Journal Officiel de la République (après avis du garde des Sceaux et du ministre du Budget).

Commentaires

Par la création de cette nouvelle ANC, la France se dote d’un outil qui se veut plus efficace, toujours aussi réglementaire et plus tourné vers l’international.

Plus efficace. Une autorité au lieu de deux, et un champ d’application plus élargi (des dispositions qui devaient passer auparavant par le champ de la loi pour modifier le Code de Commerce passeront désormais par l’ ANC).

Aussi réglementaire.
Le non-respect de dispositions comptables pouvant entraîner des poursuites pénales, il était hors de question de laisser le champ libre à une autorité exclusivement « technicienne », sans assentiment de la puissance publique, ni publication au Journal Officiel (la logique est la même aux USA, où le FASB ne peut aller contre la volonté de la SEC, dont le président est nommé par le président des Etats-Unis).
Il est à noter que le gouvernement n’ a plus le pouvoir d’écrire directement des textes comptables , mais peut refuser ceux proposés par l’ANC (cf. supra).

Tourné vers l’ international. Les autorités françaises, ayant réalisé qu’il valait mieux accompagner le changement mondial comptable que de le subir (cf. règlement 2002-12 sur les immobilisations), ont donc mis en place avec l’ ANC une structure d’étude et d’alerte pour espérer « peser » à temps avant que des nouvelles dispositions IFRS, qui seraient par trop éloignées de la doctrine française en la matière, ne soient adoptées définitivement par l’ IASB (même si le « filtre » européen doit ensuite jouer son rôle).

Il reste toutefois à espérer :
* du point de vue comptable, que la puissance publique réalise que seul un travail professionnel, pris suffisamment en amont, et coordonné avec d’autres pays, a quelques chances d’être pris en compte. Le travail, plutôt que l’incantation ! 
* du point de vue fiscal, que Bercy saura, si d’aventure une prochaine norme IFRS était peu ou prou transposée en droit français (on pense naturellement aux normes IFRS pour entités non cotées), légiférer fiscalement en temps utile, et non pas le tout dernier jour, comme les professionnels du chiffre l’avaient constaté pour la transposition fiscale du règlement 2002-12. [entrée en vigueur pour l’exercice 2005, publication du texte fiscal au J.O. le 31/12/2005]

Jean-Luc Peyret