6. La diversification en elle-même ne crée pas de valeur

Dans les pays émergents, les groupes diversifiés sont fréquents car le sous-développement relatif des marchés financiers fait que cette forme d’organisation en est un substitut : le groupe alloue les capitaux en son sein comme s’il était lui-même un marché financier. Mais quand les marchés financiers se développent, ce type d’organisation doit démontrer qu’elle est toujours efficace. Face à quelques succès (Bouygues, Berkshire Hathaway), l’histoire abonde d’exemples de recentrage et de concentration sur un métier : Schneider, Daimler, Hanson, BTR, ITT, Gulf and Western, Lagardère, Accor, etc

Ce n’est pas parce que l’on est bon dans un secteur qu’on l’est nécessairement dans un autre comme l’illustre malheureusement le groupe Arnault avec Carrefour, Allianz avec Dresdner, etc.

On pourrait penser que les groupes de LBO (Carlyle, Wendel, KKR, Eurazéo, PAI…) constituent les nouveaux groupes diversifiés d’aujourd’hui mais ce serait être victime d’une illusion d’optique : leur périmètre changeant tout le temps, ils n’ont pas de métier sauf d’acheter avec un effet de levier des entreprises et de les revendre !

 

7. Le coût du capital est seulement fonction du risque des actifs

Le coût du capital, abrégé du coût moyen pondéré du capital, est le taux de rentabilité exigé par l’ensemble des pourvoyeurs de fonds de l’entreprise qu’ils soient actionnaires, prêteurs (banques, marché obligataire, marché des billets de trésorerie…) sur leurs fonds investis dans l’entreprise. Autrement dit, le coût du capital correspond au coût de reconstitution aujourd’hui du passif financier de l’entreprise. Comme celui-ci finance l’actif économique de l’entreprise, le taux de rentabilité qu’exigent globalement les pourvoyeurs de fonds (le coût du capital) correspond donc au taux de rentabilité à exiger de l’actif économique compte tenu de son risque1.

La fiscalité n’a rien à voir là-dedans et le croire est une dangereuse illusion. S’il suffisait de s’endetter pour abaisser son coût du capital en bénéficiant de la déductibilité fiscale des frais financiers, pourquoi les sociétés qui ne craignent pas la faillite comme Apple, Nestlé, Maroc Télécom, General Electric, Hermès, etc. sont-elles très peu endettées ?

 

8. La comptabilité n’est pas la finance

À la différence de la comptabilité, la finance prend en compte le futur et donc le risque. On pourrait même dire que la finance s’intéresse quasiment uniquement au futur et que la comptabilité, par construction, ne s’intéresse qu’au passé. Elle ne peut donc pas prendre en compte le risque, dimension inexistante du passé mais essentielle du futur.

Ce qui veut dire deux choses :

  • Que l’on ne peut pas être un bon financier si l’on n’est pas d’abord un bon comptable afin de comprendre comment le passé a été traduit (trahi ?) dans les comptes ;
  • que les critères comptables comme le bénéfice par action, la rentabilité des capitaux propres sont à examiner avec précaution. Une hausse de ces critères n’est pas synonyme d’augmentation de la valeur si elle est obtenue en contrepartie d’une augmentation du risque dont ces critères comptables ne rendent pas compte par définition2.

Ainsi, s’endetter pour racheter ses propres actions et les annuler conduit le plus souvent à une hausse du BPA mais ne correspond à une hausse de la valeur qui si les actions ont pu être rachetées à un prix inférieur à leur valeur.

 

9. Faire attention à la fascination fiscale

Payer des impôts n’a jamais été particulièrement jouissif et beaucoup d’entreprises et d’investisseurs passent beaucoup de temps à utiliser au mieux les dispositions existantes pour payer le moins d’impôt possible. Notre expérience nous a prouvé que ce temps serait mieux utilisé à penser en termes financiers plus qu’en termes fiscaux.

En effet, nous avons souvent vu des décisions financières prises sur la base de critères fiscaux qui se sont traduits, in fine, par des pertes de substance plus fortes que l’économie d’impôt obtenue. Ainsi, certains voudront garder quelques mois de plus une participation qu’ils ont décidé de vendre afin de bénéficier d’un taux d’impôt plus bas à cause d’une durée de détention alors plus longue. Mais si dans l’intervalle les valeurs ont baissé de 25 % comme cet été, le gain fiscal a plus qu’été compensé par la perte financière !

Mieux vaut donc prendre une décision financière et l’appliquer en optimisant la fiscalité que l’inverse.

 

10. La crise, le seul mode de régulation efficace du capitalisme

Nous sommes tous des êtres humains avec des sentiments d’espoir et de peur qui nous portent à faire alterner phases d’optimisme et phases de pessimisme se traduisant par des booms et des crises. C’est ainsi.

Il y a eu dans le passé des crises et il y en aura dans le futur car comme nous l’écrivons dans l’avant-propos de l’édition 2012 du Vernimmen : « Dans le monde agité dans lequel nous vivons, la seule certitude est bien celle de l’incertitude. »

Il faut ne pas l’oublier et agir en conséquence, d’autant que l’Histoire donne des motifs de confiance.

[tabs slidertype= »top tabs »][tabcontainer] [tabtext]1.[/tabtext] [tabtext]2.[/tabtext] [/tabcontainer] [tabcontent] [tab]1. Pour plus de détails, voir le chapitre 34 du Vernimmen 2012.[/tab] [tab]2. Pour plus de détails, voir le chapitre 32 du Vernimmen 2012.[/tab] [/tabcontent] [/tabs]

 

Pour lire la première partie de l’article.