Pour les responsables de la mise en place d’un programme de prévention et détection de la corruption il n’est pas aisé de convaincre la direction générale et les membres du comité de direction de l’importance de mobiliser des ressources internes et externes pour mettre en conformité l’entreprise avec la loi Sapin 2. Cela est d’autant plus important que la loi Sapin 2 introduit un véritable changement culturel en raison de sa portée extraterritoriale c’est-à-dire qu’elle s’applique aussi aux faits de corruption commis hors du territoire français.

Plutôt qu’un long discours, les graphiques ci-dessous édités dans le rapport sur la corruption transnationale publié par l’OCDE en 2014 (« une analyse de l’infraction de corruption d’agents publics étrangers ») vous aideront à sensibiliser vos collègues au contexte dans lequel votre entreprise va maintenant opérer avec la loi Sapin 2.

 

Qui détecte la corruption : l’audit interne est le gardien du temple !

Source : Rapport OCDE 2014

 

Comment savoir si votre entreprise participe à des faits de corruption si vous ne disposez pas des moyens et outils pour les détecter ?

Le graphique ci-dessus démontre clairement que seules les entreprises qui disposent d’un service d’audit interne, d’un dispositif de lanceur d’alerte ou qui ont inclus dans des due diligence d’acquisition une investigation sur la corruption sont en mesure de détecter la corruption. Pour toutes les autres entreprises la probabilité est grande pour qu’elles ne détectent pas en interne et à temps d’éventuels faits de corruption.

 

Et pourtant, les conséquences peuvent être graves pour les entreprises et leurs dirigeants :

Pénalités en cas de non observation des mesures rendues obligatoires par la loi, risques financiers et risques de réputation et d’image.

D’une part, L’AFA (« Agence Française Anti-corruption ») peut infliger des sanctions aux entreprises qui ne se seront pas mis en conformité avec la loi Sapin 2. Pour rappel, l’AFA peut aller jusqu’à poursuivre la société concernée et le cas échéant prononcer – via sa commission de sanctions – une sanction pécuniaire dont le montant peut atteindre 200.000 € pour les personnes physiques et 1.000.000 € pour les personnes morales. La décision peut faire l’objet d’une publication.

D’autre part, les coûts et dysfonctionnements liés à des poursuites judiciaires et à une éventuelle condamnation constituent aussi une conséquence sérieuse en cas de non-détection : honoraires des avocats et autres conseils, campagnes de presse adverses, perturbation du management de l’entreprise, pertes de marchés et de clientèle etc.

A ce titre le rapport de l’OCDE publie des chiffres éloquents sur les sanctions imposées aux entreprises et personnes concernées par des affaires de corruption.

 

Source : Rapport OCDE 2014

 

Des peines d’emprisonnement ont été infligées à 80 personnes physiques jugées coupables d’actes de corruption transnationale.

La peine la plus longue prononcée à l’encontre d’une personne physique condamnée pour actes de corruption transnationale est une peine d’emprisonnement cumulée de 13 ans, la peine la plus coûteuse infligée à une personne physique a atteint 149 M$ et l’amende cumulée la plus importante dans une affaire de corruption transnationale a atteint 1,8 Mds $.

Les membres de comités de directions sont les plus concernés par cette loi !

Du fait de leur niveau de responsabilité ils ont la possibilité d’engager des dépenses et d’apporter du chiffre d’affaires pour leur entreprise et sont donc statistiquement les plus concernés par le dispositif de prévention à mettre en place.

 

Source : Rapport OCDE 2014

 

Dans 41 % des affaires, des salariés appartenant à la direction ont versé ou autorisé le versement de sommes d’argent pour corrompre un agent public et le PDG de l’entreprise a été impliqué dans 12 % des affaires.

  

A ce stade de la présentation vos interlocuteurs devraient être convaincus de l’importance du sujet et commencerons à vous interroger pour en savoir plus.

Nous terminerons donc cet article par deux questions fréquentes posées par les dirigeants: quels sont les secteurs d’activités les plus touchés et quels sont les pays qui à ce jour ont le plus condamné des faits de corruption ?

 

Source : Rapport OCDE 2014

 

Deux-tiers des affaires de corruption transnationale ont eu lieu dans quatre secteurs : les industries extractives (19 %), la construction (15 %), le transport et l’entreposage, (15 %) et le secteur de l’information et de la communication (10 %). Par ailleurs, 94 % des entreprises sanctionnées avaient un effectif supérieur à 250 salariés.

  

Enfin, les pays qui sanctionnent le plus sont à ce jour : les Etats-Unis et l’Allemagne.

Les lois anti-corruption ayant une portée extraterritoriale, les sanctions prononcées ne concernent pas toujours des personnes physiques ou des entreprises domiciliées dans le pays ayant prononcé la sanction.

Source : Rapport OCDE 2014

 

De plus, le nombre de cas sanctionné par pays dépend de l’ancienneté des lois en application dans chaque pays et du niveau de répression appliquée. Par conséquent, la France qui vient de mettre en place une loi pourrait enregistrer une augmentation des sanctions dans le futur.

 

Sources de l’article :

Rapport sur la corruption transnationale publié par l’OCDE en 2014 : une analyse de l’infraction de corruption d’agents publics étrangers (51 pages)

 

Cet article a été publié sur Vox-Fi le 21 juin 2018.