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La réforme des retraites britanniques crée un bouleversement dont les conséquences à long terme sont difficiles à prévoir et à quantifier. « Il s’agit du changement le plus significatif depuis près d’un siècle dans la manière dont les retraités pourront percevoir leur pension », a déclaré George Osborne, ministre britannique chargé des finances et du trésor, en mars dernier.

Au Royaume-Uni, les retraites se composent d’un socle public de l’État et d’un étage supplémentaire relevant de l’entreprise. Contrairement à la France, la part des retraites d’entreprise dans la somme totale perçue par un retraité britannique peut être très significative. Les changements annoncés par George Osborne portent sur la famille des régimes d’entreprise les plus courants de nos jours : les régimes dits « à cotisations définies ».

Un bouleversement important

Jusqu’à présent, au moment de leur départ à la retraite, les salariés britanniques ne pouvaient percevoir en capital une portion de leurs avoirs acquis que sous des conditions très restrictives. De cette manière, le législateur protégeait le pensionné en s’assurant qu’il bénéficie, tout au long de sa retraite, d’un revenu minimum nécessaire.

Après une période de transition qui s’achèvera en avril 2015, ce principe sera totalement remis en cause au profit de la responsabilisation totale du retraité. Au moment de leur départ à la retraite, les bénéficiaires de régimes à cotisations définies pourront effectuer des retraits « comme ils le souhaitent et quand ils le souhaitent ». En outre, les régimes à prestations définies des entreprises privées pourront toujours être transférés vers des régimes à cotisations définies.

Le retraité seul face à son risque financier

Cette situation va introduire un paramètre d’incertitude difficile à prévoir et à quantifier. Quelle sera la véritable demande de capital en lieu et place des annuités? A quel rythme et pour quels montants? Et lorsque surviendront ces demandes, quels actifs financiers seront les premiers à être réalisés ?

Si les assureurs, gestionnaires du lucratif business des annuités, ont évidemment beau jeu de dire que cette situation pourrait engendrer une menace de cession massive d’obligations d’État, la réalité pourrait être tout autre. Enfin, on aura déporté le risque de gestion financière du fonds de pension ou de la compagnie d’assurance vers l’individu. Celui-ci va se retrouver seul face à son risque financier et, plus grave, seul face à son risque de longévité. C’est la raison pour laquelle une information précise devra être fournie aux bénéficiaires avant la liquidation de leur retraite afin qu’ils puissent prendre leur décision en pleine connaissance de cause.

Il reste que les solutions de gestion financière de type LDI devront sans doute être revisitées à l’aune de ce risque subit d’appel de fonds de la part des participants, et que des couvertures d’inflation ou de longévité qui avaient été mises en place pour des populations entières pourraient devenir moins pertinentes, ou du moins être re-calibrées, ce qui n’est pas simple.

Gardons également en perspective que, dans le même temps, se met en place la réforme EMIR qui exige la compensation des produits dérivés et qui sera mécaniquement très consommatrice de collatéral. Encore une source potentielle de besoin en actifs non risqués, de cash, besoin qui pourra toutefois être honoré par d’autres formes de collatéraux ou de garanties comme le laissent présager certaines pistes de réponses à apporter à « l’article 50 » en France.