Dissonance dans la propriété intellectuelle
Ce graphique est tiré de l’excellent blog du Peterson Institute sous la plume de Nicholas Lardy dans un billet du 20 avril 2018. Il fait figurer différents pays classés par le montant qu’ils paient en droits de propriété intellectuelle.
Vient quelque chose de bizarre à sa lecture. On pourrait croire que les pays qui paient le plus sont ceux qui ont la base industrielle la plus grande et qui, ouverts au monde, acquittent un fort montant de droits liés à l’utilisation de brevets et autre propriété intellectuelle.
Eh non ! les deux pays qui arrivent en tête sont l’Irlande et les Pays-Bas. Pas de surprise pourtant. C’est bien par le jeu des droits sur immatériel et au travers de ces deux pays en particulier que les grandes multinationales arrivent à rapatrier les profits qu’ils accumulent gaiement en Europe, en général libres de toute taxe. En 2016, c’est 75 Md$ qui sont sortis par ce canal de la République d’Irlande et qui bien sûr y étaient rentrés préalablement sous forme de profits transférés, comptabilisés dans leur PIB.
Vox-Fi s’est déjà fait l’écho de ce phénomène, par exemple sous la plume de François Lequiller, ancien responsable des comptes nationaux à l’OCDE « Le PIB irlandais : de qui se moque-t-on ? » en date du 20/11/2017 ; et plus anciennement, en 2013 preuve que le phénomène est ancien et que rien n’a trop changé : « Sur les impôts d’Apple, c’est nous les pommes ! ».
Pour qui souhaite regarder en détail quel genre de montage fiscal utilisent les grands de la tech, et notamment le toujours valide Double Irish Dutch Sandwich, Vox-Fi renvoie utilement à ce billet de notre Conversable Economist favori.
Notre ministre des finances, M. Bruno Le Maire, souhaite récupérer un peu de cet argent via la taxe sur les sociétés du numérique, risquant crânement une rétorsion trumpienne. C’est petite monnaie face aux sommes en jeu.
Cet article a été publié sur Vox-Fi le 7 août 2019.