La résilience d’une organisation repose notamment sur la confiance de ses acteurs, définie comme « la présomption qu’en situation d’incertitude, ses différentes parties vont, y compris face à des circonstances imprévues, agir en fonction de règles de comportements acceptables » (Putnam, 1995). La confiance implique donc une connaissance des parties prenantes de l’organisation, de la prédictibilité de leurs comportements et de l’assurance de leur fiabilité. Mais cette confiance présente en fait trois dimensions (Moorman et Saltzman, 1992) : cognitive (confiance-trust), elle est fondée sur la connaissance d’autrui ; affective (confiance-confidence), elle repose sur des sentiments envers autrui ; conative (confiance-reliance), elle s’applique à une organisation activée par « des comportements réguliers, honnêtes et coopératifs » de la part de ses membres (Fukuyama, 1994) et elle s’adresse à une « institution régie par des statuts, des règles, des normes et des valeurs partagées » (Reed, 2001).

La succession récente de crises de natures financière (qualifiée de « crises de la dette »), écologique (attribuée au réchauffement climatique), économique (marquée par un retour de l’inflation), sociale (imputable à la désindustrialisation) et géopolitique (provoquée par la guerre en Ukraine), a entraîné, parmi une fraction croissante de l’opinion publique européenne et surtout française, une perte de confiance dans la capacité des institutions et des organisations actuelles à faire face aux crises et à gérer les transitions écologique et énergétique. La méfiance a frappé tout à la fois les partis politiques, les partenaires sociaux et les actionnaires. Elle a engendré une perte de confiance en soi de la part de nombreux acteurs-sujets, allant parfois jusqu’à la radicalisation de leurs comportements.

Un retour de la confiance dans les organisations implique donc une restauration des valeurs de citoyenneté qui fondent une société et une économie. Le respect de ces valeurs exige une reconnaissance de la légitimité des institutions et de l’efficience des organisations (selon les prescriptions de Reed, 2001), mais plus encore, il repose sur la conviction du bien-fondé des actions citoyennes en faveur du co-développement des capacités productives et créatives des entreprises, de la coévolution de l’économie et de la nature, ainsi que de la cohabitation entre générations. Ce respect ne peut être restauré que par des actions d’éducation, de formation et d’encadrement, menées conjointement par les familles, les enseignants, les gouvernants des institutions, mais aussi les dirigeants et les managers des organisations.

 

Références

Fukuyama F. (1994), Trust: the Social Virtues and the Creation of Prosperity, Free Press.

Luhman N. (1979, 2006), Trust and power, John Wiley.

Moorman C., Zaltman G. (1992), “The dynamics of trust within and between organizations”, Journal of Marketing research, 29, p.314-318.

Putnam R-D. (1995), “Bowling Alone: America’s Declining Social Capital », Journal of Democracy 6 (1), p.65-78.

Reed M. (2001), “Organization, trust and control: a realist analysis”, Organization studies, 22,2, p.201-228.

 

 

Cet article a été initialement publié sur Vox-Fi le 19 juin 2023.