Société Générale : Tout ça finira par un mariage
La présentation de la stratégie de la Société Générale, le 18 septembre 2023, par son nouveau patron était très attendue. Déçus, peut-être parce qu’ils en attendaient beaucoup, les investisseurs ont durement sanctionné le titre. Le cours de l’action s’établissait en recul de 12%. 2€ Mads de capitalisation sont partis en fumée dans la foulée des annonces.
La mission du nouveau patron, M. Krupa, s’annonce en tout état de cause difficile après 15 ans de gouvernance par son prédécesseur. Les chiffres sont cruels et traduisent l’échec complet de la présidence de M. Oudéa.
- L’action SG a été divisée par 2 en 15 ans.
- La capitalisation de la banque était de l’ordre de 15€ Mds lorsque M. Oudéa a quitté la SG. Pour rappel la capitalisation de la BNP s’établit à 70€ Mds alors que les deux banques étaient au coude à coude en termes de capitalisation au début des années 2000.
- La SG a apporté environ 100$ Mds de financement aux énergies fossiles en 15 ans.
- La banque a cédé progressivement de nombreuses filiales et réduit la voilure dans de plusieurs métiers sans donner le sentiment que cela correspondait à une stratégie de recentrage délibérée.
- La banque dépense 4,7€ Mads en frais informatique par an…largement supérieur à ses pairs ?
- Le développement international de la banque se conclue par des pertes conséquentes comme la Russie par exemple.
- La SG se retrouve parmi les banques les moins performantes, avec Deutsche Bank ou Commerzbank.
- Le manque de confiance dans cette banque se retrouve logiquement dans sa valorisation, parmi les plus faible d’Europe : L’action se négocie à 1/3 de sa valeur comptable.
Avec un tel bilan, il est difficile de comprendre comment la situation a pu durer aussi longtemps. Parfois, la notion de Gouvernance, le « G » de ESG[1] est assez difficile à visualiser ou à chiffrer. L’exemple de la Société Générale est intéressant en comparant à la BNP. L’écart lié à la Gouvernance peut être chiffré à 50€ Mds. Sans parler de l’écart de rendement entre les deux qui s’accroit d’année en année.
Tout ceci expliquait l’ampleur des attentes de la stratégie du nouveau dirigeant.
La plupart des analystes a directement pointé la modestie des ambitions : Croissance quasi nulle du PNB, amélioration de la rentabilité des fonds propres relativement faible, légère baisse du ratio de fonds propres, projet de réduction des coûts, nouvelles cessions à venir… Le discours de M. Krupa était également empreint de prudence après des années d’annonces de la direction précédente pratiquement systématiquement démenties par les faits.
En fait le sujet est plutôt que ce qui a été annoncé hier relève plus d’un suivi trimestriel ou semestriel des résultats que de la révélation d’une stratégie. Les chiffres annoncés et « l’amélioration du cours de bourse » sont des conséquences d’une stratégie pas un plan stratégique en tant que tel.
La Société Générale est-elle encore une banque universelle ? Est-elle encore une banque internationale ? Quels sont ses facteurs de différenciation ? Comment s’inscrit la banque dans un monde plus digital ? Comment la banque va-t-elle gérer l’arrivée de l’IA ?
À aucun moment, il n’a été fait mention des clients, des produits ou des salariés…
Enfin, le point positif de la présentation d’hier concernant la réduction des soutiens aux industries fossiles est passé au second plan car il est impossible de savoir à quelle politique environnementale cela se raccroche stratégiquement.
Je ne doute pas une seconde qu’une telle banque n’ait envisagé tous ces aspects et questionnements. Le fait que le nouveau management dans sa première prise de parole se concentre sur des éléments financiers et laisse ouvert le chantier des cessions, incite plutôt à penser que la Société Générale se prépare à un mariage.
[1] L’ESG (Environnement, Social et Gouvernance) est un terme générique qui désigne les critères de responsabilité sociale et environnementale…